Главная страница «Первого сентября»Главная страница журнала «Французский язык»Содержание №3/2009

Les Routes de l’Histoire

La naissance de l’étiquette

« Pour recevoir un hôte dignement, il faut dès son arrivée,
que ses yeux soient charmés par la vue d’une belle femme,
d’un beau cheval et d’un beau chien… »

François Ier

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La Cour apparaît véritablement grâce à François Ier. Prenant exemple sur les Cours italiennes, il y introduit des filles et femmes de la noblesse, dont la présence modifie l’image de la Cour et fait apparaître ce qu’on n’appelle pas encore l’étiquette.

Vivre à la Cour, c’est suivre le roi dans ses déplacements. La Cour royale voyage beaucoup et fait penser à une foule joyeuse qui fait halte dans des résidences somptueuses. On y installe alors les meubles, les tapisseries, le lit du roi, tout cela transporté dans des charrettes. Des chiens, des ours, des chameaux, des lions font partie du convoi qui se donne des airs de cirque ambulant. Banquets, ballets, bals, théâtre, tout est prévu pour que jamais on ne s’ennuie. Les rois aiment la fête, les jeux. Chaque jour doit être un tourbillon de joie, de rires, de divertissement, mais aussi d’élégance et de bon goût. On cultive l’art de la conversation, on s’entoure de lettrés et d’artistes. La Cour n’obéit pas encore à une étiquette rigoureuse, et il faut improviser. Mais c’est déjà un monde clos où se forment des intrigues et des complots. Henri II, fils de François Ier, a beaucoup recueilli de ces traditions. Il sera plus attentif à certaines règles destinées à développer les vertus essentielles qui caractérisent des courtisans1 : honneur, courage, dévouement au roi, politesse, élégance, goût de la vérité. C’est la conversation qui devient un passe-temps préféré. Donc, la Cour est « la seule école où on apprend à bien parler»2. Henri II transmet à ses fils l’idéal chevaleresque : les jeunes princes s’affrontent déjà en joutes3 courtoises, ils apprennent à rompre des lances et organisent des mascarades.

À mesure que la Cour s’organise, l’étiquette se renforce. Henri III, fils d’Henri II et de Catherine de Médicis, ritualise le protocole à l’extrême. Le cérémonial y devient plus maniéré : lorsque Henri prend son repas, il ne veut pas qu’on lui parle et fait établir une barrière pour qu’on ne puisse pas approcher de la table royale. Les repas se déroulent en silence ; les ordres sont donnés sans qu’aucune parole ne soit prononcée, par signes de la main. Chaque moment de la vie quotidienne du roi, du lever au coucher, est soumis à des règles strictes qui préviennent le rôle, la place de chacun et les conditions d’accès au monarque. De l’aube à la nuit, les courtisans se succèdent comme dans un ballet aux entrées bien réglées. C’est le plus éminent des princes qui tend au roi sa chemise, le premier gentilhomme de la chambre veille à la toilette. Les distractions elles-mêmes doivent être ordonnées et les jeux ne s’exécutent que selon des règles précises.

Le savoir-vivre à table

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C’est François Ier qui a ramené des campagnes d’Italie l’usage de l’assiette de faïence qui remplace les écuelles en bois et les plats de métal. Mais on mange encore avec ses doigts : la fourchette ne fait son apparition qu’à l’époque du petit-fils de François Ier, Henri III qui l’a découverte à Venise : elle ne possède alors que deux ou trois longues dents.

Le savoir-vivre s’applique aux comportements entre convives de table. Il est interdit de « tourner la tête pour voir ce que les autres mangent » ; il est recommandé de manger à bouche mi-close4, « se couper et de se nettoyer les ongles avant les repas ; « se peigner si l’on doit manger avec des gens de qualité » ; « couper le pain avec son couteau et non point avec les mains comme les affamés » ; « recracher derrière sa serviette un morceau trop chaud et non le remettre dans le plat ou le jeter sous la table » ; « ne pas se gratter à table » ; « ne pas ronger les os, mais se servir du couteau pour en tirer la chair »; de modérer son appétit et « ne pas se comporter en loups affamés »5. On se lave les mains à la fin du repas ; l’eau utilisée est tiède, parfumée à la fleur d’oranger, la lavande, mais le plus souvent à la rose ou à l’iris. La nourriture arrive couverte dès que les hôtes sont assis à table. Les grands personnages font procéder à « l’essai de la nourriture » avant les repas : la peur du poison incite à certaines précautions. Le service se fait « à la française » : tous les plats arrivent en même temps. On partage son verre avec son voisin de table, et même parfois avec tous les convives, mais lorsque c’est le cas, on recommande de s’essuyer la bouche avec soin. L’eau du puits étant difficilement consommable, le vin est la boisson la plus courante, remplacée par la bière ou le cidre, dans les régions de production. Les enfants en boivent, coupé d’eau, à partir de cinq ans.

La Cour des dames

On a déjà dit que c’est François Ier qui introduit la présence permanente des femmes en proclamant qu’« une Cour sans dames, c’est un jardin sans bonnes fleurs». En prolongement de cette Cour, Catherine de Médicis crée l’« Escadron volant : deux cents dames et demoiselles de qualité recrutées parmi les plus grandes familles de la noblesse, choisies pour leur beauté, leur charme, leur talent à chanter et danser », dont le rôle est de fixer les hommes, mais par des moyens honnêtes. La reine demande qu’elles « constituent une école de vertu et de bonnes mœurs, vrai paradis sur terre »6.

Les salons

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Une des qualités les plus appréciée à la Cour étant l’aisance à converser, ce sont des « salons », où brillent les dames. Marguerite de Navarre, sœur de François Ier, Diane de Poitiers, favorite de Henri II, Marguerite de Valois, épouse d’Henri de Navarre (futur Henri IV), en sont des exemples prestigieux. Grâce aux femmes, la société devient plus artiste, plus raffinée. On tient à ce que les dames soient traitées avec « grand honneur et respect. » On n’oublie pas ce qu’avait déclaré un jour François Ier: « Quiconque touche à l’honneur des dames sera pendu sans rémission. » Les salons parisiens sont fréquentés par les poètes de la Pléiade et font la part belle à la poésie grecque et latine, au chant accompagné au luth et à la musique. Le reflet de la vie quotidienne se retrouve dans ces petits vers légers qu’on appelle les rondeaux et épigrammes galants. Les bouts-rimés, épigrammes, quatrains, proverbes, devises, sont à la mode. Comme à l’époque de l’amour courtois, on aime discuter autour un sujet de débats, par exemple : « Une femme doit-elle cacher l’amour qu’elle porte à un homme ? » ou « Si celui-ci ne s’aperçoit pas de sa flamme, peut-elle lui ouvrir les yeux ? ».

Les danses de salon

À la Cour, les bals ont lieu deux fois par semaine, et ils réunissent tous les personnages importants. Pendant que le roi achève son repas, les musiciens s’installent dans la salle de bal éclairée de flambeaux où sont disposés quelques tabourets. Aucun raffinement particulier n’est exigé pour la toilette. Les hommes conservent cape et épée ainsi que leur coiffe ; les dames ont leur robe à traîne et il est d’usage qu’elles choisissent elles-mêmes leurs partenaires. Puisant leur origine dans la culture populaire, les danses sont proches des danses folkloriques : ainsi, la valse et la polka, d’origine paysanne, deviennent des danses de salon.

Toutes les danses sont entrecoupées de révérences et de pas, lorsque le couple dansant marche le long de la salle en mesure. Au cours de ces allées et venues à pas réglés, on change de partenaire. Beaucoup de danses ressemblent à un ballet réglé avec des figures classiques représentant des scènes telles que « l’hommage à la dame ».



1 Ce code de Baldassarre Castiglione est publié à Venise en 1528.

2 Du Bellay

3 Combat singulier à la lance et à cheval.

4 Les Allemands mangent la bouche fermée.

5 Jeannine Garrisson, Les Manières de table.

6 Brantôme, Vie des Dames galantes.

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