Главная страница «Первого сентября»Главная страница журнала «Французский язык»Содержание №16/2009

Les Routes de l’Histoire

Au Quartier Latin

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Camille Desmoulins

L’étape suivante de notre itinéraire révolutionnaire va se passer au Quartier Latin. Nombre d’importants événements de la Révolution française ont eu lieu ici. En outre, il a eu un rôle important dans le mouvement des Lumières. Aujourd’hui, il subsiste dans le quartier pas mal de témoignages architecturaux, signes de cette époque. Par exemple, regardez attentivement les plaques des rues : souvent, le mot « saint » de la plaque de rue gravée dans la pierre a été martelée par les athéistes farouches de l’époque. Le volet rive gauche de cette promenade part du Sénat, au carrefour de la rue de Vaugirard et de la rue de Tournon.

Le palais du Luxembourg

Afin de construire le palais du Luxembourg pour Marie de Médicis, veuve de Henri IV et mère de Louis XIII, on démolit, en 1615, le précédent hôtel, sauf la partie de l’actuel Petit Luxembourg, et édifie trois grands corps de logis, avec un pavillon et un beau dôme. L’ensemble est parfait. Le palais devient alors manufacture d’armes, puis prison. Après l’adoption, en septembre 1793, de la loi sur les suspects, les prisons n’y suffisaient plus, on entassaient les prisonniers aux collèges, dont deux collèges au Quartier Latin, dans les couvents de Paris et au palais du Luxembourg même, pouvant abriter près de mille détenus (dont Camille Desmoulins, Danton, Joséphine de Beauharnais1). Le peintre David y a passé également quelque temps après le 9 Thermidor. Le Directoire2 s’y est installée en 1795. Depuis 1804, c’est le palais de Sénat.

Le Théâtre de l’Odéon, miroir de l’Histoire

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Maximilien Robespierre

Il se trouve au centre de l’élégante place de 1780. L’édifice a été conçu dès 1770, sous le règne de Louis XV, pour accueillir les « comédiens français » et terminé en 1782. Il a pris le nom de Théâtre Français et aurait pu vivre les jours heureux avec la prestigieuse troupe du roi. C’est là que le 27 avril 1784, a eu lieu la représentation du Mariage de Figaro de Beaumarchais. L’histoire du théâtre est étonnante : à peine ouvert, il ferme. À peine fermé, il ouvre. Royal un jour, impérial aux Cent-Jours3, national un autre jour, il est à l’image de ces temps troublés où la France avance en zigzag. En 1789, le théâtre change de nom et devient Théâtre de la Nation. Il a pour mission d’être la « maison du citoyen ». En 1794, l’Odéon est rebaptisé Théâtre de l’Égalité et ouvre sous les couleurs bleu-blanc-rouge. Il acquiert son nom définitif, le Théâtre de l’Odéon, en référence à la Grèce antique4, sous le Directoire. Suite à un incendie, survenu en mars 1799, le théâtre est restauré en 1807. Il prend le nom de Théâtre de l’Impératrice et Reine.

Lors la Révolution de 1830, le théâtre est au centre du soulèvement insurrectionnel. Les étudiants se jurent de vaincre la tyrannie et crient comme en 1792 : « La liberté ou la mort ! ». Les auteurs de l’école romantique, Hugo en tête, ont tout fait pour remplir les salles du théâtre. L’empressement avec lequel le public se pressait à l’Odéon, où Dumas, Vigny, Musset menaient les batailles acharnées, en témoigne ; jamais on n’a autant poignardé, assassiné, empoisonné sur scène que dans ces années 1830.

En mai 1968, les étudiants révoltés occupent le théâtre, selon la tradition historique. Depuis 1996, il s’appelle l’Odéon-Théâtre de l’Europe. Reconstruit à l’identique, le théâtre a été rénové et a rouvert ses portes en avril 2006.

À la poursuite de Camille Desmoulins

Au N° 22 rue de Condé habitait dans un appartement Lucile Duplessis (1771-1794) avant son mariage avec Camille Desmoulins (1760-1794). Camille, issu d’une modeste famille, devient avocat et rencontre Lucile à la veille de la Révolution. Le 29 décembre 1790, il l’épouse. Robespierre, camarade de collège du marié, et Danton assistent à la noce. Homme de plume et grand agitateur, Camille acquit rapidement une grande popularité au club des Cordeliers. Député à la Convention, Desmoulins s’inquiète pourtant de la violence qu’engendre la Révolution. Il lance alors un nouveau journal, Le Vieux Cordelier, où il attaque la Terreur. Voilà ce qu’il y écrit le 20 décembre 1793 : «  Ô mon cher Robespierre ! Ô mon vieux camarade de collège ! Souviens-toi de ces leçons de l’histoire et de la philosophie : l’amour est plus fort, plus durable que la crainte ! ». La réponse du « cher camarade » a été l’arrestation le 31 mars 1794 et la guillotine le 5 avril suivant. La veille de son exécution, Camille écrit une lettre déchirante à sa jeune épouse adorée : « Adieu, ma Lucile ! J’étais né pour faire des vers, pour défendre les malheureux, pour te rendre heureuse ! J’avais rêvé une république que tout le monde adore ! Je n’ai pu croire que les hommes soient si féroces et si injustes ! Ma Lucile, vis pour Horace, notre fils, parle-lui de moi, tu lui diras que je l’aurais bien aimé ! ». Lucile, son épouse, va se trouver sur l’échafaud une semaine après Camille, le 13 avril 1793. Elle va au supplice avec le sourire. À ceux qui veulent la consoler, elle répond : « Regardez donc si mon visage est celui d’une femme qui a besoin d’être consolée ! Depuis huit jours, je ne forme plus qu’un vœu, celui d’aller retrouver Camille ! Et ce vœu va s’accomplir ! »

La Cour du Commerce – Saint-André

On la retrouve juste en face, au N° 130 boulevard Saint-Germain. Vous allez adorer ce vieux passage aux gros et rudes pavés. C’est surtout la nuit qu’il sait garder son mystère. La Cour du Commerce doit son nom à la présence de nombreuses boutiques.

Ouvert vers 1735, la plupart des maisons qui le bordent datent de 1776. À partir du N° 8, s’étend une longue demeure basse aux nombreuses lucarnes qui a abrité l’imprimerie de Marat. C’est là qu’était réalisé L’Ami du Peuple.

L’atelier du bon charpentier

À l’emplacement du N° 9 se tenait l’atelier du charpentier allemand Schmidt. C’est lui qui a eu l’honneur d’expérimenter en avril 1792 une terrible machine qui n’est pas encore appelée la guillotine. Essais concluants, le charpentier Schmidt va gagner beaucoup d’argent à construire « une philanthropique machine à décapiter ».

Le café Procope

Il se trouve au 13, rue de l’Ancienne-Comédie. Fondé en 1686 par le Sicilien Francesco Procopo dei Coltelli, c’est le plus ancien café au monde, comme on peut le lire sur la plaque en marbre sur rue. C’est là que se rassemblaient des encyclopédistes (Diderot, Rousseau, Voltaire et d’autres) dont on connaît l’apport primordial en terme de bouillonnement d’idées révolutionnaires. Le 27 avril 1784, Beaumarchais s’y énervait en attendant le verdict du public pour sa pièce Le Mariage de Figaro. C’était aussi le rendez-vous des révolutionnaires habitant le quartier (Camille Desmoulins, Danton, Marat). C’est ici qu’ils ont décidé d’attaquer les Tuileries en 1792, c’est ici qu’a été porté pour la première fois le bonnet phrygien. Si Danton venait au Procope en voisin, c’est qu’il habitait de l’autre côté de l’actuel boulevard Saint-Germain, place Henri Mondor.

Retournons sur nos pas jusqu’au carrefour de l’Odéon et … le voilà !

La statue de Danton

Dès la sortie du métro « Odéon », rencontre nez à nez avec l’une des figures les plus marquantes de la Révolution française : Georges Danton ! Qualifié par Taine5 : « Un colosse d’une laideur tragique et terrible, un masque convulsé de bouledogue grondant, une voix tonnante, une déclamation effrénée, pareille aux mugissements d’un taureau…» Aujourd’hui, rendez-vous populaire pour amoureux, la statue de Danton est érigée à l’emplacement exact de la maison où il occupait un appartement de sept pièces. Sur le socle, vous retrouverez deux des maximes les plus fameuses de Danton : « Pour vaincre les ennemis de la patrie, il nous faut de l’audace, encore de l’audace et toujours de l’audace... » et « Avec le pain, l’éducation est le premier besoin du peuple ».

Le club des Cordeliers

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Jacques-Louis David, L’assassinat de Marat

Au 15, rue de l’École-de-Médecine (ancienne rue des Cordeliers), dans le couvent des Cordeliers a été créé l’un des plus importants clubs politiques de la Révolution. Les cordeliers (ou franciscains) étaient l’un des quatre grands ordres de moines mendiants, qui faisaient vœu de pauvreté. C’est donc là qu’en 1790 s’installe le club des Cordeliers créé par Camille Desmoulins, Georges Danton, Jean-Paul Marat. Assis autour des tables, on parle fort dans une atmosphère surchauffée où se côtoient des artisans, des ouvriers, des femmes, des enfants. Mais Marat est assassiné par Charlotte Corday. Quant à Danton et Desmoulins qui estiment que puisque la République n’est plus menacée en 1794, la Terreur n’a plus de raison et que le temps de clémence est venu, tentent d’en persuader Robespierre. En vain ! Celui-ci tient à poursuivre sa « dictature de la vertu » ! Robespierre, ce dictateur froid, déclare que Danton prépare une insurrection. Le club des Cordeliers est supprimé. Danton, Camille Desmoulins, Fabre d’Eglantine (vous vous en souvenez ? Poète, auteur de Il pleut, il pleut bergère et du calendrier républicain) sont arrêtés et guillotinés le 5 avril 1794. En passant sur la charrette fatale devant la maison du menuisier Duplay où loge Robespierre, Danton s’écrie : « C’est en vain que tu te caches, Robespierre, tu me suivras. Ta maison sera rasée ! ». Au bourreau qui l’exécute, il dit : « Tu montreras ma tête au peuple, elle en vaut la peine ! ». Après la disparition de ses animateurs, le club des Cordeliers perd toute influence. Les bâtiments sont transformés en hôpital en 1795, puis démolis au XIXe siècle, à l’exception de l’ancien cloître dont on peut admirer l’imposante structure aujourd’hui.

Ici se trouvait la maison de Marat

Au N° 30 de la rue des Cordeliers s’élevait la maison de Marat. C’est là que le 12 juillet, Charlotte Corday d’Armont, descendante d’une sœur de Pierre Corneille6, se rend avec un grand couteau de cuisine, caché dans son sac. Une jeune aristocrate hait Marat. Pour elle, c’est Marat qui est un dictateur fou ! Il faut le tuer, elle va le faire ! « L’ange de l’assassinat », comme l’appellera Lamartine, part pour Paris. Elle y arrive le 11 juillet, loue une chambre à l’hôtel de la Providence. Le 13 juillet, elle se rend au Palais-Royal où elle achète un couteau de table. Le lendemain, elle lui adresse un message et retourne à son domicile. Marat, rongé par un terrible eczéma, prend un bain d’eau sulfureuse, la tête enveloppée de compresse de vinaigre, au premier étage de sa maison. Les domestiques la font entrer. Charlotte entre et sans dire un mot, lui plante alors le couteau dans la poitrine. Le coup est fatal, comme le montre le fameux tableau de David. Marat est mort, mais la belle meurtrière ne s’enfuit pas : elle se fait arrêter. La Convention réserve à Marat des funérailles solennelles. Son corps est porté au Panthéon. Quant à Charlotte, elle est condamnée à mort par le Tribunal révolutionnaire et exécutée le 18 juillet 1793. Quand le juge lui demande les raisons de cet assassinat, elle répond : « Je n’ai pas tué un homme, mais une bête féroce. » Elle est morte courageusement. Sur le chemin de l’échafaud, debout, les bras tendus sur la charrette, elle croise fièrement les regards de Danton, Desmoulins et Robespierre qui assistent au passage du convoi. Elle est inhumée dans la fosse commune de l’ancien cimetière de la Madeleine, comme tous ceux qui sont exécutée place de la Révolution. Elle s’appelait Marie-Anne Charlotte de Corday. Elle avait 25 ans. La maison de Marat sera démolie en 1876.

Poursuivant la rue de l’École-de-Médecine, prenons le boulevard Saint-Michel à droite, jusqu’à la place Edmond-Rostand. À gauche, la rue Soufflot nous conduit au Panthéon. N’hésitez pas d’y entrer et surtout de descendre dans la crypte.

Le Panthéon

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Le Panthéon

L’histoire de ce monument débute sous Louis XV. Le monarque, gravement malade, fait le vœu, s’il échappe à la mort, d’élever en lieu et place de la vieille église Sainte-Geneviève, une grande église pour abriter les reliques de sainte Geneviève, la patronne de Paris. La première pierre de l’église est posée par le roi guéri en 1764 et est construite sur les plans de l’architecte Soufflot. L’église à peine achevée en avril 1791, l’Assemblée constituante décide de la transformer en temple destiné à recevoir « les grands hommes de l’époque de la liberté française », un Panthéon républicain, sur lequel on a écrit « Aux grands hommes, la patrie reconnaissante ». C’est Mirabeau qui y est entré le premier, suivi de Voltaire, Rousseau, Marat. Et puis les modes évoluent : Mirabeau et Marat ne sont plus en odeur de sainteté révolutionnaire et doivent partir. La sépulture de Mirabeau est alors profanée et ses cendres jetées aux égouts de Paris. Les restes de Marat sont inhumés dans le cimetière de Sainte-Geneviève, près de l’église Saint-Étienne-du-Mont, à côté du Panthéon. Les restes de Diderot (1713-1784), quant à eux, ne sont pas retrouvés et ne peuvent être transférés au Panthéon. On lui élève cependant un monument. Le tombeau de Rousseau (1712-1778), dont une gravure évoque l’influence de sa pensée après sa mort, fait face à celui de Voltaire : les deux phares de la pensée française du XVIIIe siècle, ennemis de leur vivant, sont ainsi réconciliés dans la mort.



1 Future épouse de Napoléon Bonaparte.

2 Nom du régime politique mis en place le 26 octobre 1796.

3 Le terme « Cent-Jours » désigne la période de l’Histoire de France comprise entre le 1er mars (retour en France de l’empereur Napoléon 1er ) et le 18 juin 1815 (défaite de Waterloo).

4 Odéon, du grec Ωδείον (littéralement « construction destinée à des concours musicaux », mot dérivé du grec « chanter » qui a aussi donné ode), est le nom de divers édifices de la Grèce antique affectés aux exercices de chants, aux représentations musicales, aux concours de poésie et de musique.

5 Hippolyte Adolphe Taine est un philosophe et historien français (1828-1893).

6 Pierre Corneille (1606-1684) est un auteur dramatique français du XVIIe siècle.

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