Je vous salue, ma France
« De Gaulle – au musée ! »
Le 13 mai 1968. La révolte qui, au début, est le fait des seuls étudiants, s’étend à d’autres couches de la population. Les syndicats appellent à la grève générale, tentant de lier leurs revendications à celles des étudiants. Ils demandent une augmentation des salaires et une réduction du temps de travail. 800 mille manifestants crient : « CRS1 – SS ! », « De Gaulle – au musée ! », « De Gaulle – assassin ! », « À bas de Gaulle et soutien à Georges2 ! », « Solidarité ouvriers-étudiants ! ».
En réalité, le rapprochement ouvriers-étudiants
se fait mal, même si, à la mi-mai, plus de deux millions de salariés sont en grève. La grève générale paralyse l’activité nationale, provoquant la crise politique.
Le drapeau rouge est hissé sur la Sorbonne ouverte à tous, elle est décrétée « Université autonome populaire ». Dans la cour, on joue du piano. Des posters de Mao, de Castro, de Trotski, de Che Guevara, sont collés aux murs. On discute dans les amphithéâtres, jour et nuit. Dans une atmosphère survoltée, on reporte les examens, on parle même de les supprimer. Les graffitis se multiplient sur les murs de la chapelle de la Sorbonne, des couloirs, de la cour, les portes :
« Soyez réalistes : demandez l’impossible. »
« Si tous les vieux se donnaient la main, ce serait ridicule. »
« J’emmerde la société ! »
« Professeurs, vous nous faites vieillir ! »
« L’anarchie – c’est l’ordre. »
« Quand on te frappe la joue gauche, tends le poing droit ! »
Le 14 mai, le Théâtre de l’Odéon est pris par un groupe d’acteurs menés par Raymond Rouleau qui sympathise avec des mouvements de gauche. Les manifestants déclarent que le théâtre sera désormais interdit aux spectateurs bourgeois, et qu’ils sont « ici pour organiser des spectacles révolutionnaires ».
Les usines Renault se mettent en grève le 15 mai. La SNCF3 , Air France et la RATP4 se mettent à leur tour en grève, bloquant ainsi des moyens de transport public. Le mouvement des « enfants qui sèment » s’est transformé en révolution.
1 Compagnies républicaines de sécurité.
2 Georges Pompidou.
3 La Société nationale de chemins de fer.
4 Régie autonome des transports de Paris.