Главная страница «Первого сентября»Главная страница журнала «Французский язык»Содержание №9/2007

Arts et culture

Andreï Makine La Femme qui attendait

(extrait)

Dans le roman La Femme qui attendait, l’action se passe dans le village Mirnoïé qui se trouve au nord de la Russie non loin de la mer Blanche. Le héros du roman, le jeune homme qui est en même temps le narrateur, est venu dans ce village pour étudier le folklore. À Mirnoïé il rencontre une femme, Véra, qui reste fidèle à l’homme qu’elle avait aimé. Il était parti pour la guerre il y a trente ans et n’en était pas revenu. Le jeune homme tâche de comprendre le phénomène de l’amour de Véra.
Un jour, les vieilles femmes du village lui donne un petit concert de chant folklorique…

« L’amour c’est comme les crues au printemps, déclara Katérina, on n’y peut rien. Même si c’est l’automne maintenant… »

Le chœur attaqua. En soliste, elle leur répondit. « Il viendra d’au-delà de la mer, de la mer Blanche, vaste et froide », chantait Katérina et le chœur reprenait : « …de la mer Blanche, il viendra… »

« Il viendra avec l’aurore qu’il trouvera là où le soleil se couche, il l’amènera pour toi, d’au-delà de la mer », – sa voix devenait plus songeuse et le chœur répondait en écho plus lointain, en marquant le chemin parcouru par le voyageur.

Les corps des femmes jouaient le fiancé et son élue qui montaient dans une barque et s’apprêtaient à parcourir la mer Blanche. On imaginait facilement qu’en réalité cette traversée épique se passait non pas en mer, mais sur le lac qui bordait Mirnoïé et que l’endroit « où naît l’aurore » était la petite colline sur l’île. Les vieilles comédiennes agitaient lentement les bras pour imiter le mouvement des rames.

« Il viendra malgré les brouillards et les neiges, pour t’aimer… », chantaient-elles. Leurs lèvres avouaient ce qu’elles avaient réellement vécu, elles : des hommes qui partaient et qui disparaissaient à jamais dans les fumées grasses de la guerre, des hommes couverts de blessures qui revenaient pour mourir sur le bord de ce lac.

« Et votre maison sera pleine de joie comme une ruche pleine de miel… » Et la sonorité des voix disait la solitude des isbas ensevelies sous la neige où elles allaient terminer leurs jours.

« Il viendra, entonna Katérine d’une voix plus forte qui marquait la fin proche de la cérémonie, il viendra, les bras fatigués par le voyage mais le cœur tout vif pour toi… »

Soudain, nous vîmes Véra.

Elle était arrivée visiblement bien avant cette dernière partie de la représentation et, inaperçue, était restée accotée au chambranle de la porte, sans vouloir interrompre le chœur. C’est sa fuite qui l’avait trahie. La porte grinça, nous nous retournâmes, elle était là, la main sur la poignée. Ses traits étaient torturés par un sourire figé, ses yeux s’agrandissaient sous les larmes retenues.

Le chœur se tut. Seule Katérina continua à chanter :

« Il viendra malgré la tempête de neige… Il viendra pour t’emmener là où l’aurore naît… Il viendra… »

Fiche pédagogique

par JELEZNIAKOVA Tatiana

VOCABULAIRE

les crues (f) – паводок, половодье
songeux, -se – задумчивый
élue (m) – избранница
comédienne (f) – актриса
rame (f) – весло
ruche (f) – улей
ensevelir – погребать
entonner – запевать
visiblement – видимо
chambranle (m) – дверная рама
grincer – скрипеть
torturé – искаженный
figé – застывший

QUESTIONS

1. Ce texte, quelle impression vous laisse-t-il ?

2. La guerre de 1941-1945, quel rôle a-t-elle joué dans la vie de Véra ? dans la vie des femmes russes ?

3. Qu’en pensez-vous, la fidélité à un homme disparu il y a trente ans, c’est naturel ou absurde ?

4. Cette fidélité, c’est un sentiment d’amour ou quelque chose d’autre ? Est-ce que l’amour peut durer trente ans après la séparation d’un jeune homme et d’une jeune fille ?

5. Pourquoi le jeune homme des années 70 ne comprend pas « la femme qui attendait » ?

6. Pourquoi quand même l’énigme de Véra l’inquiète ?

7. Pourquoi cherche-t-il les causes de cette fidélité ?

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