Arts et culture

Catherine Deneuve, l’alter ego au féminin

« Serge, c’est un homme qui a eu un mal fou à se remettre de son physique,
mais aussi de son échec en tant que peintre. Ces deux éléments l’ont poussé
à rechercher autre chose et l’ont amené à construire un autre univers,
à une forme de génie. Et puis je trouve qu’il avait un charme fou ! »
Catherine Deneuve

« Catherine est une femme charmante, très ambiguë
et une comédienne avec un potentiel dramatique extraordinaire. »
Serge Gainsbourg

Gainsbourg fait à nouveau l’acteur. Je vous aime de Claude Berri, film qui réunit Depardieu, Trintignant, Souchon, Gainsbourg et Deneuve, est l’occasion, pour ces deux derniers, de se rencontrer. Pour accompagner la sortie, en 1981, de cet émouvant portrait de femme, ils enregistrent, en duo, Dieu est un fumeur de havanes. Catherine Deneuve, l’actrice, admire le génie musical de Gainsbourg et lui reconnaît un talent particulier de parolier provocateur. Se noue, entre les deux personnalités, une relation chargée de respect et fortifiée par de nombreux points communs.

« Comme acteur il était formidable parce que sous toutes ses réserves ou cette façon qu’il a de se protéger derrière la fumée de sa cigarette, on sentait sa fragilité. Il devait craindre aussi de ne pas être à la hauteur de ce qu’on lui demandait. Et il termine toujours gagnant. Sa gentillesse profonde le trahit. »

Elle devient très vite son amie confidente. Elle répond que ce lien est un attachement complice, sans ambiguïté. « Serge était vraiment un copain, pas un ami – un copain ! D’ailleurs, il me disait que je me comportais comme un garçon. Le soir, je l’accompagnais, on est beaucoup sortis ensemble à une époque où il avait une vie très difficile. Je rigolais beaucoup avec lui, il était très drôle. »

Quand, dix ans plus tard, elle apprendra sa disparition, elle aura cette phrase sublime pour lui rendre hommage : « Serge Gainsbourg… L’homme incandescent ¹ au désespoir fragile… ». À son enterrement, c’est elle, des lunettes noires masquant son chagrin, qui lira l’oraison² funèbre, reprenant ainsi la devise de Gainsbourg, « Fuir le bonheur de peur qu’il ne se sauve ».

Serge GAINSBOURG

Dieu est un fumeur de havanes³

(1980)

Dieu est un fumeur de havanes
Tout près de toi, loin de lui
J’aimerais te garder toute ma vie
Comprends-moi ma chérie

Tu n’es qu’un fumeur de gitanes⁴
Et la dernière je veux
La voir briller au fond de mes yeux
Aime-moi nom de Dieu...

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¹ Incandescent – qui produit une lumière et une chaleur intenses.

² Une oraison est une prière religieuse méditative centrée sur la contemplation divine.

³ Marque de cigares cubains.

⁴ Marque de cigarettes brunes, très populaire en France dans les années 1970.