Courrier des lecteurs
Irina KORNEYEVA
Une petite histoire d’amour…
Prologue
Prologue
« Irina, un rayon de soleil venu de la Russie ! Comme vous l’avez été lors de notre première rencontre, vous êtes pétillante, souriante et ce fut un véritable plaisir de travailler avec vous… Laurence. »Une petite histoire d’amour…
« Ma petite Irina ! Je suis vraiment contente de t’avoir connue. Tu es vraiment une fille super. Toujours le sourire, tous tes amis français t’ont adorée… Ta copine, Philou. »
« Irina ! ! ! Je t’écris ce petit mot pour te dire que t’es une fille adorable et que j’aurais toujours une pensée pour toi et pour ton sourire. JE T’AIME ! ! ! Gabi… »
Zut ! Je tape sur le clavier pour commencer cet article par les mots de mes amis français et je sens mes mains frissonner. Laurence. Je l’ai adorée, moi. Le dernier jour elle m’a avoué qu’elle avait 41 ans. Et jamais elle n’avait eu d’enfants. Je crois que les deux mois et demi qu’on a travaillé ensemble elle me prenait pour sa fille. Philou. Philipine… Une fille incroyable ! On a fait connaissance vraiment par hasard. J’étais assise sur un banc quand je l’ai vue passer avec ses copines.
– Salut, les filles ! c’était moi et ma copine russe qui avons commence à parler.
– Salut ! Vous êtes étrangères ?
– Exact ! Russes !
– Bah, oui ? ! Mais vous savez, les Français ne saluent jamais les premiers. Moi, je m’appelle….
Gabi… Gabriel Burriez. Celui que j’ai vu pour la première fois le 25 juillet… Le jour de mon anniversaire. Alors c’était le meilleur cadeau !
Je regarde mon carnet et relis ce que tous ces gens et encore une douzaine d’autres m’ont écrit. Une Italienne qui s’appelait Valéria m’a souhaité de garder toujours mon sourire et ma bonne humeur. Paul, le mari de ma directrice, a supposé que la Russie était un beau pays, parce que « si tu, Irina, représentes ta patrie, elle doit être vraiment très agréable ». Et encore les noms… Stéphane, un autre Stéphane, Jocelyne, Sébastien… Ce sont ceux avec qui j’ai passé mon premier séjour en France. Un excellent séjour ! J’étais venue là-bas pas seulement pour travailler et gagner le sou. Je ne cherchais pas non plus à y épuiser mon cerveau par la mémorisation de tous les mots français que j’entendais. J’étais venue en France pour être plongée dans une vie extrêmement curieuse pour moi, étrangère ; une vie que j’apprécie, qui me convient….
Et encore, j’étais venue en France pour qu’on me fasse découvrir que j’étais la plus souriante dans le monde entier !
Seule à Paris
J’y suis arrivée fin juin. Il faisait beau, chaud. Mon avion a atterri à l’heure indiquée et tout a commencé à aller comme sur des roulettes. Depuis mon arrivée en France je n’étais jamais ni alarmée, ni déçue. Tout passait comme je le voulais et je sentais toujours mon visage étinceler du sourire extasié. Oh, les Français, que vous pouvez en être passionnés ! Un jour un businessman français tout à fait inconnu m’a invité à prendre du café parce qu’il a bien aimé par le premier coup d’œil « un sourire vachement naturel ». On a pris un petit café crème, on a parlé trois quarts d’heures et après on ne s’est plus jamais vu. Une autre fois, quand moi et ma copine, nous étions trop pressées, on a essayé de faire de l’auto-stop. Et le miracle s’est vite fait. On a vu s’arrêter une hyper récente Mercedes qui était conduite par une femme vraiment aisée. « Je ne m’arrête plus pour les autostoppeurs depuis que j’ai été agressée il y a 3 ans, a commencé cette belle inconnue. Des jeunes en masques ont chipé tout ce qu’il y avait de précieux. Ils m’ont tapée… » « Mais pourquoi vous vous êtes arrêtée cette fois ? » « Vous avez de beaux sourires ! J’aime bien ça. Et je vous prends… » Alors ce que j’ai assimilé en France c’est que mon sourire attire l’attention. C’est super donc ! C’est mon être.
Paris. Je me traînais à peine en montant du métro, mais aussitôt que je me suis trouvée dans une rue bien animée (même la nuit !) je me sentais respirer un air que je connaissais. Je n’avais aucun doute : j’y avais été autrefois… dans une vie précédente.
Paris. J’y étais seule. C’est-à-dire j’y avais mes copines russes qui participaient elles aussi au même programme, mais j’ai préféré dès le début de mon séjour parisien me passer de la compagnie. Surtout de la compagnie des Russes. Pour moi, cette rencontre désirée avec Paris avait le caractère d’une entrevue bien intime. Je ne voulais pas du tout qu’on m’organise des excursions. Je regardais toujours avec ironie les foules des touristes qui cherchaient à parcourir tout le Paris en une demi-journée. Impossible ! Moi, j’étais à Paris pour saisir le rythme de la vie parisienne, pour examiner les figures de ceux et celles que j’y voyais passer. J’étais allée à Paris pour en emporter une parcelle et tout ce qui se présentait pendant mes balades, tout ça a bien vite rempli mon cœur sans être bien évident pour les autres par leurs yeux.
Une petite histoire d’amour…
Paris. Je m’y sentais toujours heureuse. Je me suis installée à Montmartre et chaque jour en passant sur ses ruelles j’admirais un des plus beaux édifices de la capitale. Le Sacré-Cœur. Moi, qui suis toujours charmée des symboles religieux soit orthodoxes, soit catholiques, j’étais toute stupéfiée par sa magnificence irréelle. Le Sacré-Cœur m’a ensorcelée et c’est rien à dire. Il a changé toutes mes idées sur les choses sacrées de l’Église et a donné à penser que c’est nul, la vie des êtres comparée l’éternité de la foi et de la pierre dont cette cathédrale était construite. L’image à la voûte de Jésus Christ aux bras étendus c’est vraiment terrible ! C’est ce qui saute tout d’un coup aux yeux et dont on garde longtemps un souvenir dans son âme. J’avais un jour la chance d’assister à la messe et en découvrant le style tout à fait étranger du culte religieux je me suis senti liée avec tous ces gens que j’y ai vu prier et se croiser de gauche à droite. Mais en dehors du service divin c’est toujours un spectacle saisissant qui passe. En vous trouvant sur les marches qui mènent au Sacré-Cœur vous voyez devant vous tout Paris ! C’est la meilleure place pour embrasser toute la ville d’un coup d’œil. C’est ça, ma place préférée. J’y suis allée tant de fois et je regardais le beau « visage » de ma « bien-aimée » les larmes aux yeux. Elle le mérite…
Paris. C’est également le berceau des arts. Les deux derniers jours de mon séjour à Paris j’avais un dilemme : soit aller acheter des fringues pour que j’aie des affaires acquises dans la Capitale de la Mode, soit aller regarder de Grands Chef-d’œuvres tels que Vénus de Milo au Musée du Louvre ou de belles toiles des impressionnistes au Musée d’Orsay. J’aurais trahi tous mes principes si j’avais choisi le premier. J’ai rêvé de voir les trésors de l’art mondial depuis mes études à l’école secondaire. Et je les ai vus, moi ! J’ai senti la fièvre m’attaquer quand je passais de galerie en galerie au Musée du Louvre. J’ai vu la Joconde, j’ai passé une demi- heure devant la statue de la Victoire de Samothrace et j’avais mon visage baigné de larmes quand j’ai aperçu la Vénus de Milo. Rien à ajouter. Au Musée d’Orsay j’étais de nouveau frappée au plus profond du cœur par les œuvres de Renoir, Cézanne, Pissarro, Degas… J’avais devant moi les meilleures toiles d’Art, j’ai eu du mal à le croire !
Paris ! ! ! Il vous donne plus que vous ne le pensez. Il s’offre à vous sans demander quelque chose en retour. Il exige qu’un seul truc : en la visitant une fois vous devrez l’aimer toute votre vie. Et moi, j’y ai obéis …
Mon petit Paris, que tu me manques !
Le cœur des Alpes
Me voilà au beau milieu de mon histoire. Franchement, il fallait que je commence mon article par cette partie parce que c’est pour le travail temporaire aux Alpes que j’étais venue en France. D’après mon contrat j’étais placée dans une petite station de ski située aux Alpes en altitude de 1 800 mètres. C’était pas vraiment ce dont j’avais rêvé … Ou plutôt, ça ne l’était pas du tout. Avoriaz, pour y aller, j’ai pris le TGV et un car et je suis arrivée à mon nouveau logement le 26 juin… tandis que la saison d’été ne commence que le premier juillet. Venue de Paris, j’étais toute envoûtée par mon voyage qui commençait, mais ce que j’ai vu à Avoriaz, dès que j’y suis arrivée, m’a désespérée. Vide ! Y avait personne dans les rues, tous les magasins étaient encore fermés, pas de signe de vie dans toute la station. Seules les montagnes vigoureuses m’entourant de quatre coins me présageaient leur compagnie pendant deux mois et demi… PRISONNIÈRE ! En jetant encore un regard sur « ces murs des pierres » je me suis mise à pleurer. J’étais toute découragée devant mon petit calendrier qui n’en signait que le début.
Une petite histoire d’amour…Mais comme je vous l’ai dit plus haut, on croirait que toute mon histoire en France était prévue et il y avait dans la même résidence une personne qui m’attendait et qui est devenue plutôt ma meilleure amie. Elle était aussi Russe et elle s’appelait… Irina ! ! ! Il y avait donc, depuis, à Avoriaz, Irina Blonde et Irina Brune (ou bien Irina avec un « s » à la fin) que tout le monde a vite appréciées et commencé à nommer les deux Super-Star d’Avoriaz. Et j’avoue que ça nous faisait un énorme plaisir à toutes les deux. On était les femmes de chambre d’une grande résidence de 16 étages et normalement on faisait les lits le matin et passait l’aspi l’après-midi. On y était les seules étrangères ce qui attirait toujours l’attention de nos clients. « Oui, Monsieur, j’habite en Russie tout près de la Chine », « Merci, Madame, je parle bien français parce que je fais mes études en fac de français… » Les questions pareilles étaient posées du matin au soir et nous avons bientôt composé la complète liste des réponses qui convenaient à chaque occasion. Les Français ont bien aimé notre façon de travailler. Par exemple, nous finissions toujours les dernières car nous ne passions pas l’aspi sans monter les objets du sol. Cette minutie saoulait parfois les autres équipes de ménage, mais nos clients se renseignaient toujours à la réception où nous étions quand nous avions le congé et n’ouvraient leurs portes qu’avec le sourire et en disant par blague : « Oooh, les Russes attaquent l’appartement ! ».
« Superski ». On a vu ce mot familier du russe sur la vitrine d’un magasin et on a donc pris cette belle appellation de « skis qui sont super » pour la formule de notre vie à Avoriaz. C’était vraiment « superski » ! Une autre fois nous avons vu des mots bien connus ornant les résidences : « Malinka », « Elinka », « Chapka », « Datcha », « Douchka ». J’ai expliqué à mes collègues ce que tous ces mots signifiaient, surtout le dernier et un jour j’ai entendu quelqu’un m’appeler « Mademoiselle Douchka ». J’ai eu mon petit surnom depuis.
Avoriaz. Que j’ai aimé ce petit coin alpin ! Situé dans le département de Haute Savoie à quelques pas de la Suisse, il représente un ensemble magnifique de montagnes, de verdure et ciel bleu. Le matin, les voix enthousiasmées des alpinistes me réveillaient. Je les voyais de loin escalader les montagnes. Vers midi, des parapentes multicolores traversaient le ciel en énormes oiseaux. Malheureusement, il n’y avait pas de mer, mais il y avait des piscines réchauffées toutes bleues, toutes transparentes ! J’avais ma journée de travail jusqu’à 17 heures et ensuite j’en profitais ! J’ai fais plusieurs connaissances. Le papa de Philou (de ma copine préférée) m’a invitée un jour avec l’autre Irina à dîner. On a mangé la raclette, la spécialité savoyarde avec de la pomme de terre, fromage, charcuterie et nous avons préparé les « oladouchki » dont Olivier et sa fille sont restés tout contents. Pour mon anniversaire, j’ai invité tous mes nouveaux copains àu resto. Il y avait des Francais, une Italienne, un Corse… Quand ma fête touchait à sa fin, j’ai fait la connaissance d’un jeune homme aux yeux bleus et à l’apparence de Méphistophélès (c’est Philou qui a inventé ça). Alors j’avais à Avoriaz une petite histoire d’amour toute romantique, toute mignonne…
Épilogue
C’est expert que j’interrompe mes souvenirs par cela. C’est une histoire à continuer. Mon amour de la France, des Français, de leur culture n’a fait que commencer. Je suis née il y a presque 20 ans dans une toute petite ville russe. Mais cet été j’ai compris que mon âme ayant déjà peut-être des centaines d’années avait eu un autre lieu de naissance…
Il est natif de la France.