Je vous salue, ma France
Jeanna AROUTIOUNOVA
Voyage au Pays des gourmets
Depuis plusieurs siècles la France est considérée comme le paradis de la gastronomie. La gastronomie date en France du siècle de Louis XIV. Sous le règne de Louis XIV, à la Cour et dans la haute noblesse, il y avait parfois jusqu’à quarante-huit plats dans un souper. Le repas était divisé en trois, quatre ou cinq services : les hors-d’œuvre, les entrées, les rôtis, les entremets. On apportait un ensemble de plats (parmi lesquels on choisissait ce qu’on voulait), puis on desservait et on apportait une nouvelle série de mets, chaque ensemble constituant « un service ». C’est au milieu du XVIIIe siècle qu’on se mit à présenter aux invités les premiers « menus », sous la forme de cadrans divisés en quartiers symbolisant les différents services. Au XIXe siècle, le menu permettait aux convives de savoir si on allait leur servir un repas « à la française » (avec plusieurs services) ou bien un repas dit « à la russe » qui se répandait de plus en plus, et où il n’y avait qu’un seul service.
Partout dans le monde la France est célèbre pour sa cuisine, qui est reconnue pour sa recherche de l’excellence. Elle renferme une histoire culinaire si riche en traditions qu’il est impossible de la présenter en une seule fois (sur une seule assiette). C’est pourquoi je vous propose de faire un voyage dans le pays des gourmets à travers les produits qu’on y consomme.
Avant d’entreprendre ce voyage savez-vous quelle est la différence entre « un gourmet » et « un gourmand » ?
Un gourmand aime manger de bonnes choses et en mange beaucoup, un gourmet est quelqu’un qui reconnaît et apprécie la cuisine raffinée et le bon vin.
On associe des adjectifs différents à ces deux noms ; on dit un fin gourmet, mais un gros gourmand. Le mot gourmand a eu, à une époque, un sens péjoratif et désignait quelqu’un « qui mange avec avidité ».
Eh bien, je vous invite au voyage dans un univers délicieux, exquis qui vous fera venir l’eau à la bouche.
Ananas (m)
Les Indiens de l’Amérique Centrale appellent hérissé nana qui signifie parfum. Ses qualités telles qu’ils ont spontanément juxtaposé nana au premier nom pour le désigner comme le parfum des parfums. Quand Christophe Colomb aborde les rivages de la Guadeloupe en 1493, on lui tend une tranche d’ananas comme symbole de bienvenue pour le désaltérer après tant d’eau salée ; on en accrochait même aux piquets d’entrée des huttes, portes ouvertes sur l’hospitalité. Dans son journal, il écrit : « il a la forme d’une pomme de pin, mais il est deux fois plus gros, et son goût est excellent. On peut le couper à l’aide d’un couteau comme un navet et il paraît très sain. Les Insulaires font même du vin avec le jus. » On le considère comme « le roi des fruits, car Dieu lui a mis une couronne sur la tête ». Apporté sur la table des rois au XVe siècle, il faut attendre 200 ans pour le voir pousser en serre. C’est Charles II qui reçoit en grande pompe le premier ananas cultivé en serre britannique en 1672. La France ne s’en laisse pas compter autant et, pour satisfaire les caprices de Madame de Maintenon, Louis XIV lance la culture dans les serres de son château de Choisy-le-Roi.
Artichaut (m)
La mythologie raconte que Jupiter tomba amoureux fou de Cynara, une très belle fille aux cheveux blonds cendrés qui le repoussa. Pour la châtier, il décida de la transformer en Cynara Scolymus : à savoir l’artichaut.
Aubergine (f)
L’aubergine a connu ses premiers balbutiements il y a 4 000 ans dans la région d’Assam et en Birmanie. Emportée par les grandes caravanes arabes, elle gagna ensuite l’Afrique du Nord où elle fut adoptée très rapidement par les peuples de la Méditerranée. Ceux-ci l’emportèrent lorsqu’ils envahirent l’Espagne et s’installèrent en Andalousie au début du Moyen Âge. Ce légume replet à robe violette tente la curiosité du roi Louis XIV qui demande à son jardinier d’en faire faire la culture, de cette « béringère », mais il faut attendre le XIXe siècle pour le voir apparaître dans les livres de cuisine.
Il y a très longtemps, en Orient, un prêtre voulut épouser une jeune fille dont la qualité première était qu’elle était grande cuisinière. Il alla trouver le père et exigea pour la dot 12 grosses jarres remplies à ras le bord d’huile d’olive la plus pure. La jeune fille, au retour de la noce, fit mettre à tremper des aubergines et elles burent tellement, qu’en l’espace de 11 jours, elles avaient littéralement bues la dot. Devant un tel phénomène... ou pour avoir vraiment exagérer en consommant trop gras, l’iman tomba raide mort. C’est pourquoi, dans les restaurants orientaux, on trouve parfois des aubergines frites à l’huile sous le nom de Iman Bayildi... c’est-à-dire la syncope du prêtre.
Avocat (m)
Chaque nationalité regarde avec un œil différent ce que nous offre la nature. Le fait le plus amusant concerne l’avocat. Le Philippin sera étonné, voire même choqué de voir les Occidentaux déguster un avocat en vinaigrette, farci de crevettes, de crabes, en un mot, en hors-d’œuvre. Aux Philippines, on le consomme en dessert, soit en crème glacée ou en lait fouetté. Il suffit de détacher la chair à l’aide d’une cuillère et de la réduire en purée (on peut aussi le faire au mélangeur électrique) avec du lait et du sucre et y ajouter de la glace. On peut aussi y ajouter de la crème ou du lait condensé.
Banane (f)
Au tout début, la banane n’était plus longue que 6 à 8 cm et remplie de nombreuses graines. C’est l’homme qui a domestiqué le bananier dans sa version actuelle et comestible. La plus ancienne trace fossile date de l’ère tertiaire en Inde. 500 à 600 ans avant Jésus-Christ, dans ce même pays, la banane était considérée comme le fruit du paradis et les Hindous prétendent qu’Ève a offert une banane à Adam.
Lorsque Alexandre parvint aux Indes, il défendit à tous ses soldats de consommer ce fruit jaune, trop lourd, disait-il, et capable de réduire les forces de son armée. Si la science a reconnu l’effet tonifiant de ce fruit, les âges et les continents ont apporté des versions contradictoires. Surnommée le sel de l’intelligence à cause de sa haute teneur en phosphore, elle devient un symbole de fragilité, d’instabilité des choses de ce monde chez les Bouddhistes.
Joséphine Baker a popularisé la banane apparaissant sur scène, toute vêtue de bananes. Le proverbe des Noirs des Créoles des Antilles dit : « Si Bon Dieu ti jetté banane, fè’me pas tes yeux ; ouv’e ta bouche. »
L’expression « une république de banane » a été longtemps donnée à certains pays où toute l’économie nationale reposait sur cette culture et servait, en même temps, de base alimentaire.
Belle-Hélène (f)
Nom donné vers 1864 à divers plats par plusieurs chefs de restaurants des Grands Boulevards, d’après le titre d’une célèbre opérette d’Offenbach. L’entremets Belle-Hélène se compose de fruits (poires), pochés au sirop, refroidis, égouttés, dressés sur de la glace à la vanille et nappés de sauce au chocolat chaude.
Bergamotier (m)
Si les avis des spécialistes divergent sur l’origine du bergamotier, il semble qu’il soit apparu sous forme d’hybride (oranger bigaradier et citronnier vert) dans les champs d’agrumes de Calabre entre les XIVe et XVIe siècles. Le nom, emprunté à l’italien bergamotta, serait issu du turc beg armuth qui signifie « princesse des poires ». À la Renaissance, en effet, le bergamotier était considéré comme un hybride du poirier-bergamote et du citronnier. L’essence de bergamote est bien entendu à la base de la célèbre confiserie de Nancy, mais elle est aussi très largement utilisée en parfumerie (notamment pour les eaux de Cologne), en savonnerie, en cosmétologie, dans les thés, et en tant qu’antiseptique en médecine. Il existe aussi un usage mythique : pour que le porte-monnaie ne soit jamais vide, il suffirait d’y glisser quelques feuilles de bergamotier !