Je vous salue, ma France

Georges Perec (1936-1982) Les Choses

Le 1er septembre 1965, Les Choses, premier ouvrage de Georges Perec, sort en librairie ; public et critique s’accordent vite à reconnaître dans l’ouvrage une photographie fidèle de ce qu’on appelle alors « la société de consommation ».

Il raconte la vie d’un jeune couple qui n’a malheureusement pas les moyens de ses désirs. Jérôme et Sylvie rêvent de posséder les biens annoncés dans L’Express et cherchent à se donner un certain style avec leurs maigres ressources. Ils ne peuvent pas se détourner du plaisir de posséder un divan convertible, symbole du confort et de la réussite sociale. Une occasion, qu’ils saisissent, s’offre d’aller enseigner en Tunisie. Jérôme et Sylvie se retrouvent à Sfax, où ils possèderont enfin un grand appartement avec de nombreuses pièces et pourront s’acheter de nombreux meubles. Le couple aura enfin ce dont il rêvait, mais il ne sera toujours pas satisfait. À quoi bon avoir tout cela si l’on est seul pour en profiter ? Des illusions perdues une fois de plus.

« Ceux qui se sont imaginés que je condamnais la société de consommation n’ont vraiment rien compris à mon livre », écrit Georges Perec. Effectivement, il ne condamne pas, il décrit d’un ton neutre la vie d’un petit couple. Le sous-titre « une histoire des années 60 » est donc totalement justifié. Le style est simple, l’histoire creuse de gens creux, totalement déshumanisés. L’œuvre de l’écrivain débutant porte à la réflexion sur le besoin irrésistible de toujours posséder autre chose et sur les besoins artificiels créés par la mode. Le livre connaît un succès immédiat. « Un ton original, une forme neuve de récit, un art de progresser doucement dans la pensée des personnages, tels sont les mérites de ce livre écrit par un jeune inconnu, et qui est déjà la sensation de la rentrée littéraire », lit-on dans la presse, un mois après la sortie du roman. En 1981, dans la postface de la réédition des Choses, Perec explique son œuvre : « Mon livre est parti d’une colère, puis la colère a cédé la place à la réflexion. Mon roman est une tentative de description critique. Il y a une tension entre la poussée lyrique et la volonté d’analyse, mais je crois que cette tension est créatrice ».