Arts et culture
L’âge tendre de la chanson française. Les années yé-yé
Comment s’y retrouver, en
France d’aujourd’hui, dans le rock, la chanson, le rap, la techno, bref, dans ce que l’on nomme les musiques actuelles ?
Longtemps il a été de bon ton en France (du côté des jeunes, influencés par le rock anglo-saxon et donc en rupture avec les goûts de leurs parents) de parler de la France musicale comme d’un territoire incapable de prendre le train des nouvelles musiques. Et pourtant, Sylvie Vartan, Nana Mouscouri, Johnny Hallyday, Marie Laforêt, Mireille Mathieu, Charles Aznavour, Serge Lama, Michel Polnareff, Juliette Gréco se produisent aujourd’hui dans toute la France. Ils restent populaires et leurs concerts se jouent à guichets fermés.
Plusieurs idoles des années 1960-1970 sont réapparues dans des boîtes parisiennes à la mode. En fait, ces artistes n’ont jamais arrêté. Ils continuent de tourner, et les salles sont toujours pleines. À la Fnac ou au Virgin Mégastor,1 la clientèle se presse autour des rayonnages les plus demandés : intégrale Claude François en DVD, souvenirs de Sylvie Vartan et d’Aznavour, tubes des années 1960 et 1970 de Nino Ferrer, Françoise Hardy en duo… Même constat à la billetterie où s’arrachent les places pour les récitals de Marie Laforêt, Michel Polnareff, dont le retour après 34 ans du silence est un méga-événement de la saison 2007.
Les jeunes, qui se promènent avec des baskets style 1960 aux pieds, assurent que le rétro serait « hyper branché ». Triste génération SMS souvent déboussolée, recherche les repères.
Les affiches Belles, belles, belles et Salut, Jo annoncent des spectacles faits par les jeunes en l’honneur de Claude François et Joe Dassin. Le cabaret Vian v’la Boris est créé à partir des textes et des chansons de Boris Vian, un spectacle mis en musique de jazz, avec de jeunes artistes à la fois chanteurs, comédiens et musiciens.
On dirait que quelqu’un a branché la machine à remonter le temps.
Mode, restauration, musique, édition, télévision – la tendance est aujourd’hui partout à la nostalgie. Peur de l’avenir ? Crise d’identité ? En tout cas, la France est gagnée par la nostalgie. Cette nostalgie rassemble plus qu’elle ne divise. C’est une première dans l’histoire : de 7 à 77 ans, ils ont tous vibré pour Les Amants de Saint-Jean, et Puisque vous partez en voyage, chansons des années 1930, interprétées respectivement par Patrick Bruel et le duo Françoise Hardy-Jacques Dutronc…
On le voit, la nostalgie est dans l’air du temps. Ce come-back des artistes de variétés ne prouve que l’amour pour les anciennes chansons est vivace. Quant aux chanteurs, ils traversent les époques grâce à un soutien populaire, gage de succès.
Suivons donc les jeunes Français : revisitons les tendres années de la chanson française : les années 1960, les années yé-yé qui ont bouleversé les goûts, les habitudes et les certitudes en matière de la chanson.
C’est à cette époque, qu’on voit arriver en France la vogue de la musique américaine. Ses grands prêtres s’appellent Elvis Presley ou Vince Taylor. Ils ponctuent leurs phrases musicales de « yeah- yeah », (oui-oui,), ce qui devient « yé-yé » à la française. La musique des années 1960, dérivée du rock américain, sera donc une musique yé-yé, et ses chanteurs des chanteurs yé-yé. Les chanteurs à succès provoqueront des admirations, des manifestations collectives proches de l’hystérie. Les jeunes vedettes du show-business deviennent des « idoles » et ont désormais leurs « fans » qui les appellent par leurs prénoms, comme on appelle ses copains : « Johnny, Eddy, Françoise, Sylvie, Jacques », parce qu’ils ont tous le même âge, c’est-à-dire moins de 20 ans. Ces quatre mots : copains, yé-yé, idole2 , fan3 , constituent le vocabulaire de base de la chanson des années sixties (« 1960 » en franglais de l’époque). Ces années ont débuté avec Johnny Hallyday et elles tomberont dans l’oubli au moment où il disparaîtra. Elles seront rangées dans le grenier de nos mémoires, à côté de la Belle Époque, des Années folles et de l’après-guerre des existentialistes.
Bonne visite des années tendres de la chanson yé-yé !
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1 Librairies médiatiques où on peut acheter CD, DVD, livres, appareils audio-visuels, billets aux théâtres…
2 Vedette qu’on aime par-dessus tout
3 L’appellation « fan », abréviation de « fanatique » : qui admire très vivement