Главная страница «Первого сентября»Главная страница журнала «Французский язык»Содержание №21/2007

Mon amie la langue française

Надежда БУНТМАН , Галина КУЗНЕЦОВА

Современная французская литература 1985-2005 (лекция 4)

Содержание курса
№ газеты
Учебный материал
17
Лекция 1. Цели, задачи, содержание курса. Формы контроля. Библиография периодики и критики. Литературный пейзаж современной Франции. Писатели о читателе, книге и литературном творчестве.
18
Лекция 2. Литературные премии Франции. Писатели - продолжатели традиций: Орсенна, Дормессон, Киньяр, Эрно, Жермен, Макин и др. Текст.
19
Лекция 3. Бестселлеры: Бегбедер, Нотомб, Гавальда, Уэльбек и др. Текст.
Контрольная работа № 1.
21
Лекция 4. Автобиографии, традиционные и новаторские: Симон, Роб-Грийе, Модиано, Туссен, Бобен, Ндьяй и др. Текст.
22
Лекция 5. Детективный роман. Видение истории современными писателями: Симон, Руо, Турнье, Клодель и др. Текст.
23
Лекция 6. Детективный роман: Варгас, Маншетт, Денекс, Пеннак и др. Текст.
Контрольная работа № 2.
24
Лекция 7-8. Современные авторы в поисках новых форм: Эшноз, Шевийар, Володин, Новарина и др.
Итоговая контрольная работа.

Cours 4
L’autobiographie

Au sens le plus strict du ter me, « autobiographie » est le récit que quelqu’un fait soi-même de sa propre vie. Autrement dit c’est un récit où l’auteur, le narrateur et le personnage principal coïncident.

Les origines du genre en France remonte au XVIe siècle, aux Essais de Montaigne. Au XVIIIe, c’est Jean-Jacques Rousseau qui, dans Les Confessions, livre « toute la vérité » sur sa vie. Le XIXe, avec son intérêt particulier pour une expression individuelle a offert Mémoires d’outre-tombe de Chateaubriand, Vie d’Henry Brulard de Stendhal. Le début du XXe a permis de découvrir Marcel Proust qui dans À la recherche du temps perdu analyse les phénomènes de la mémoire active pour en faire le matériau de l’œuvre littéraire.

Dans les années 50 et 60 du XXe siècle, la tradition autobiographique est développée par un grand nombre d’œuvres centrées sur les mémoires. Leur but principal est de présenter le récit de leur vie par rapport aux circonstances historiques auxquelles ils ont été impliqués. André Malraux avec les Antimémoires, François Mauriac avec les Mémoires politiques, Simone de Beauvoir avec Les Mémoires d’une jeune fille rangée et La Force de l’âge, Romain Gary avec La promesse de l’aube présentent non seulement le récit d’une vie mais surtout une vision critique de l’époque et de la société.

Cependant, au cours de ces mêmes années, le genre autobiographique a été remis en question. L’« ère du soupçon » marquée par la contestation des notions fondamentales de personnage, d’intrigue, de chronologie rend impossible toute objectivité, artificielle toute cohérence. L’autobiographie traditionnelle semble condamnée.

Paradoxalement, l’intérêt du public pour les livres qui relatent le vécu ne fait que grandir. Pour combler le vide, apparaît un grand nombre de « récits de vie » ou de « vies romancées » appelés à satisfaire la curiosité du public sur les détails biographiques des gens célèbres. Ces œuvres n’ont rien à voir avec une écriture littéraire. De cette façon, le terme même d’autobiographie devient déprécié et on commence à en chercher d’autres. Ces recherches ont marqué un renouvellement et un essor du genre.

Actuellement, on ne parle plus guère d’autobiographie. Les écrivains qui en font inventent d’autres termes. Parmi beaucoup de variantes (autoportrait, pour Marie Ndiaye, Philippe Toussaint et Christian Bobin, romanesques, pour Alain Robbe-Grillet, journal pour Michel Tournier ou roman tout court, pour Jacques Lanzmann), celle trouvée par Serge Doubrovski en 1977 paraît la plus employée : autofiction.

L’autobiographie traditionnelle établissait avec le lecteur un pacte : elle s’engageait à dire la vérité, à avouer tous les secrets intimes, à se mettre à nu (Philippe Lejeune Le Pacte autobiographique, 1975). L’écrivain d’aujourd’hui tient à se libérer de ces principes qui lui paraissent a priori impossibles. De toute façon, l’autobiographie ne peut pas être considérée comme une source d’information sûre et incontestable : tout homme peut se tromper ou passer sous silence certains faits de sa vie, par oubli, par défaut de mémoire, par respect pour quelqu’un d’autre ou en toute conscience. L’écrivain qui se met à une entreprise autobiographique est souvent à la fin de sa carrière littéraire, il voit par d’autres yeux les événements qui se sont passés dans son enfance ou dans sa jeunesse. Dans la plupart des cas, il n’a pas d’inventaire de faits de sa vie avec lieu et date marqués. En écrivant sa vie, il est surtout en quête de sa propre identité, il s’affronte à toute sorte d’hésitations, d’incertitudes, d’oublis. En plus, on ne peut pas négliger les acquis de la psychanalyse qui a expliqué qu’il est impossible de se voir objectivement et de donner une image cohérente de soi.

Le renouvellement de l’autobiographie a aussi été marqué par des recherches formelles. C’est, avant tout, le bouleversement de la chronologie. Le narrateur qui reconstitue sa vie passée est guidé dans son histoire par des associations imprévues et des hasards. Le récit prend souvent la forme de séquences juxtaposées qui se succèdent au gré d’un enchaînement fortuit de circonstances. Une autre trouvaille formelle est plutôt du domaine lexico-syntaxique : en parlant de leur vie, les écrivains refusent d’affirmer quoique ce soit. Ils préfèrent poser des questions, dire explicitement leurs hésitations ou ignorance de certains faits, ne pas finir leur phrases pour laisser libre cours à l’imagination du lecteur.

Ainsi revue, l’entreprise autobiographique est devenue intéressante même pour les représentants du Nouveau Roman. Dans Enfance, Nathalie Sarraute ne cherche plus à masquer ses hésitations, elle les exposent au début de son livre sous la forme d’un dialogue « entre deux Moi ».

« – Alors, tu vas vraiment faire ça ? «Évoquer tes souvenirs d’enfance»... Comme ces mots te gênent, tu ne les aimes pas. Mais reconnais que ce sont les seuls mots qui conviennent. Tu veux «évoquer tes souvenirs»... il n’y a pas à tortiller, c’est bien ça.

– Oui, je n’y peux rien, ça me tente, je ne sais pas pourquoi... »

Et encore un extrait de ce « dialogue intérieur » :

« – Mais justement, ce que je crains, cette fois, c’est que ça ne tremble pas... pas assez... que ce soit fixé une fois pour toutes, du «tout cuit», donné d’avance...

– Rassure-toi pour ce qui est d’être donné... c’est encore tout vacillant, aucun mot écrit, aucune parole ne l’ont encore touché, il me semble que ça palpite faiblement... hors des mots... comme toujours... des petits bouts de quelque chose d’encore vivant... je voudrais, avant qu’ils disparaissent... laisse-moi...

– Bon. Je me tais... d’ailleurs nous savons bien que lorsque quelque chose se met à te hanter... »

En même temps deux pères du Nouveau Roman entreprennent aussi une « écriture de soi » : Claude Simon, dans L’Acacia, Le Jardin des plantes et Le Tramway, Robbe-Grillet dans les trois volumes des Romanesques.

Claude Simon n’a pas écrit d’autobiographie mais dans tous ses livres on retrouve des épisodes marquants de sa vie. Ses souvenirs restent pour lui une source inépuisable d’émotions, de sensations et d’inspiration. L’auteur-narrateur réfléchit sans cesse sur le mécanisme de la mémoire et de l’écriture. Ainsi, dans Le Tramway, le narrateur, « je », raconte à la fois les années lointaines de son enfance dont le souvenir se concentre sur le tramway qui le menait au collège et à la plage, et son séjour à l’hôpital à la fin de sa vie.

Alain Robbe-Grillet, à son tour, se pose des questions autobiographiques. Les trois volumes des Romanesques ne peuvent pas être lus comme une vraie autobiographie car dès le premier volume l’auteur y introduit un personnage de fiction, Henri de Corinthe, dont la vie s’entrecroise avec celle du narrateur. Pour lui, cette écriture reste un jeu littéraire (y compris avec les genres) qui lui permet non seulement de revenir sur l’histoire de sa vie et du Nouveau Roman mais aussi sur ses propres écrits antérieurs. En parlant des  Romanesques,  il les appelle lui-même « errements autofictionnels ».

De même, Marguerite Duras qui a déjà utilisé ses souvenirs d’enfance en écrivant le roman Un barrage contre le Pacifique reprend certains épisodes de sa vie indichinoise pour écrire L’Amant. L’héroïne du roman ne s’appelle pas Marguerite, le pacte autobiographique n’est pas contracté : sur le ton de la confidence, l’auteur-narrateur continue à chercher la vérité sur cette jeune Française qui rencontre un riche Chinois sur un bac traversant un fleuve asiatique.

On pourrait associer à cette tendance autofictionnelle Annie Ernaux avec l’ histoire poignante de ses relations avec son père dans La Place, Jean Rouaud avec ses souvenirs des grands-parents et des parents dans Les Champs d’honneur et Des hommes illustres et le récit touchant du garçon dont la myopie défigure le monde dans Le Monde à peu près, Jean-Marie Gustave Le Clézio qui raconte l’histoire de sa famille émigrée à l’île Maurice dans Voyage à Rodrigues, Le Chercheur d’or, et la vie de son père dans L’Africain.

C’est aussi le cas de Patrick Modiano. Ses personnages qui s’expriment principalement à la première personne ne pourraient pas dire eux-mêmes à quel point ils sont identiques à leur auteur. Ce sont des garçons (et parfois des filles) qui n’arrivent pas à trouver leur identité, qui sont toujours en quête de leurs racines, de leurs origines (Livret de famille, Voyage de noces, La Petite Bijou). La vraie version de la vie de l’écrivain a été exposée dans le livre Un pedigree qui commence traditionnellement : « Je suis né le 30 juillet 1945, à Boulogne-Billancourt, 11 allée Marguerite d’un Juif et d’ une Flamande qui s’étaient connus à Paris sous l’Occupation. » Ce livre pourrait passer pour une vraie autobiographie (le récit des vingt-et-une premières années de la vie de l’écrivain-narrateur) si on n’y reconnaissait pas si facilement des épisodes déjà décrits dans ses nombreux romans. C’est seulement la lecture de tout l’ensemble de l’écriture de Modiano qui permet au lecteur (et à l’auteur) d’approcher le mystère de son identité.

L’autobiographie continue toujours à chercher de nouvelles formes. Jean-Philippe Toussaint fait paraître Autoportrait (à l’étranger) où sous la forme d’un journal de voyage le narrateur exprime sa vision du monde et du temps.

« Je me suis soudain senti triste et impuissant devant ce brusque témoignage du passage du temps. Ce n’était guère le fruit d’un raisonnement conscient, mais l’expérience concrète et douloureuse, physique et fugitive, de me sentir moi-même partie prenante du temps et de son cours. Jusqu’à présent, cette sensation d’être emporté par le temps avait toujours été atténuée par le fait que j’écrivais, écrire était en quelque sorte une façon de résister au courant qui m’emportait, une manière de m’inscrire dans le temps,de marquer des repères dans l’immatérialité de son cours, des incisions, des égratignures. » 

Marie Ndiaye publie Autoportrait en vert, un beau livre illustré par des photos qui rappellent celles d’un album de famille mais sont marquées comme anonymes. En décrivant plusieurs femmes en vert qu’elle a connues dans sa vie (à commencer par sa mère), femmes caractérisées plus par leur caractère « intouchable, décevante, métamorphosable » que par la couleur verte de leur vêtement, Marie Ndiaye propose son propre portrait.

Les écrivains d’aujourd’hui ont permis à la tradition autobiographique de survivre en la libérant des principes stricts du Pacte, en lui donnant beaucoup plus de liberté dans le choix des thèmes, des pronoms et des temps. Il n’y a qu’un principe qui est à l’ordre du jour : elle doit être une écriture.

Exploitation pédagogique du texte

I. Lisez le texte

« Paris le 4 août 1966.
Cher Monsieur, vous savez qu’au siècle dernier, les « sergents recruteurs » saoulaient leurs victimes et leur faisaient signer leur engagement. La précipitation avec laquelle vous vouliez me traîner à la caserne de Reuilly me rappelait ce procédé. Le service militaire vous offre une excellente occasion de vous débarrasser de moi . Le « soutien moral » que vous m’aviez promis la semaine dernière, les caporaux s’en chargeront. Quant au « soutien matériel », il sera superflu puisque je trouverai gîte et nourriture à la caserne. Bref, j’ai décidé d’agir selon mon bon plaisir et de passer outre à vos décisions. Ma situation sera donc la suivante : j’ai 21 ans, je suis majeur, vous n’êtes plus responsable de moi. En conséquence, je n’ai pas à espérer de votre part une aide quelconque, un soutien de quelque nature que ce soit, tant sur le plan matériel que sur le plan moral. 
»

C’est une lettre que je regrette de lui avoir écrite, aujourd’hui. Mais que pouvais-je faire d’autre ? Je ne lui en voulais pas et, d’ailleurs, je ne lui en ai jamais voulu. Tout simplement je craignais de me retrouver prisonnier d’une caserne dans l’Est. S’il m’avait connu dix ans plus tard – comme disait Mireille Ourousov – il n’y aurait plus eu le moindre problème entre nous. Il aurait été ravi que je lui parle de littérature, et moi je lui aurais posé des questions sur ses projets de haute finance et sur son passé mystérieux. Ainsi, dans une autre vie, nous marchons bras dessus, bras dessous, sans plus jamais cacher à personne nos rendez-vous.

« Albert Rodolphe Modiano, 15 quai de Conti, Paris VIe, le 9 août 1966. J’ai reçu ta lettre du 4 août adressée non à ton père mais à «cher Monsieur» dans lequel il faut bien que je me reconnaisse. Ta mauvaise foi et ton hypocrisie n’ont pas de limites. Nous assistons à la réédition de l’affaire de Bordeaux. Ma décision concernant ton incorporation militaire en novembre prochain n’a pas été prise à la légère. Je jugeais indispensable que tu changes non seulement d’atmosphère, mais que ta vie se fasse dans des conditions de discipline et non de fantaisie . Ton persiflage est abject. Je prends acte de ta décision. Albert Modiano. » Je ne l’ai plus jamais revu.

(d’après Patrick MODIANO, Un pedigrée)

II. Devoirs

1. Quels sont les indices du genre autobiographique que vous avez repérés dans le texte?

2. Quelle est la tonalité de la lettre de Patrick Modiano ? Justifiez votre réponse par des exemples du texte. Réfléchissez au choix des mots et à la structure grammaticale des phrases.

3. Est-ce que la tonalité de la réponse de son père est différente ? Trouvez quelques adjectifs pour caractériser cette lettre.

4. Analysez l’emploi des temps dans le deuxième paragraphe. Expliquez en trois phrases le rôle de ce passage pour l’extrait que vous avez lu.

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