Главная страница «Первого сентября»Главная страница журнала «Французский язык»Содержание №24/2007

Arts et culture

STÉPHANIE

Des cornichons au chocolat

(extraits)

(Suite. Voir N° 12, 13, 15, 17, 18, 19, 21, 22, 23/2007)

À part l’Autre et à part Garfunkel bien sûr, il y avait vraiment personne à qui je pouvais parler. C’est pour ça que je regrettais de pas avoir de Papi ou de Mamie, ils auraient vraiment pu m’aider à ce moment-là de mon histoire.
M’aider ou m’aimer, c’est presque pareil ces deux mots, il y a qu’une lettre à remplacer, un d à la place d’un m, mais à mon avis ça veut dire la même chose : quand on aide quelqu’un, on l’aime, et quand on l’aime, on l’aide.
Penser à une Mamie, ça m’a fait penser à Mamo et une fois que je me suis mise à penser à elle, alors ça a été comme un déclic et j’ai tout de suite décidé que j’allais partir la voir. C’était ça le but de ma fugue : j’allais partir chez Mamo !
Mamo, c’est comme ça que j’appelais quand j’étais bébé la dame qui s’était occupée de moi. Elle s’appelait Mme Moreau, et ma mère et mon père ils l’appelaient toujours comme ça, ils l’ont jamais appelée par son prénom et comme je ne savais pas, et que d’ailleurs je ne sais toujours pas, ce que c’était son prénom et comme j’étais encore un bébé, j’ai fini par l’appeler Mamo, c’est normal, les bébés ils font toujours ça, ils déforment tous les noms. а mon avis, c’est vraiment elle qui m’a élevée quand j’étais bébé parce que ma mère, il y a pas de raison qu’elle se soit plus occupée de moi quand j’étais bébé que quand je le suis plus. Mamo, c’était elle que je voyais tout le temps, elle me faisait manger le matin et le soir et c’était presque comme une Mamie, c’est pour ça que Mamo, finalement, c’était un nom qui allait bien. Pourquoi mon père et ma mère un jour ils l’ont plus gardée, j’ai jamais compris, mais un jour ils se sont tous attrapés tous les trois – j’ai pas compris ce qu’ils se disaient et pourquoi elle leur disait qu’elle voulait plus rester, ils ont tous beaucoup crié, elle a beaucoup pleuré, mais tout ce que je sais c’est qu’elle est partie, Mamo, on l’a plus revue depuis. Tous les Noёl, elle m’envoyait toujours une carte de vœux, mais cette année, elle l’a pas fait, mais moi je lui ai toujours répondu et je sais très bien où elle habite, dans un petit village en Normandie, ça s’appelle Arville.

La Liste de Tout Ce Qu’il Faut Pas Faire Pour Rater
Une Fugue
Stéphanie commence un pénible et dangereux voyage en faisant de l’auto-stop.
J’ai fait une petite liste dans ma tête, une toute petite liste, j’en faisais de moins en moins, la Liste de Tout Ce Qu’il Faut Pas Faire Pour Rater Une Fugue.
Faut pas emmener son chat.
Faut pas partir la nuit.
Faut savoir où on va même si dans ce cas-là c’est pas vraiment ce qu’on appelle une fugue.
Faut prendre un sac de couchage. Faut emmener du chocolat.
Faut avoir l’air plus vieux que son âge.
Faut pas avoir de remords ou de regrets.
Faut pas penser à ses parents et se demander si on a pas fait une gigantesque bêtise sidérale.
Faut pas pleurer.
Faut pas réfléchir.
Enfin bref, il faut faire tout le contraire de ce que je faisais.

Chez Mamo
Heureusement, Stéphanie qui a froid, faim et peur, trouve enfin le village et la maison de sa Mamo.
La porte s’est ouverte et il y avait une vieille dame, elle était en sabots et dans un peignoir vert comme une couverture avec un chiffon autour de la tête et j’ai pas reconnu tout de suite Mamo tellement j’ai trouvé qu’elle avait vieilli par rapport à sa photo, mais c’était bien elle ! J’ai voulu l’embrasser mais elle a levé la main et elle a dit : « Qu’est-ce que tu veux, ma fille ? »
J’ai dit : « Mais c’est moi, Mamo, c’est Stéphanie, tu me reconnais pas ? »
Alors elle a poussé un petit cri : « Stéphanie, Stéphanie, ben qu’est-ce que tu fais là, ma fille ? »
J’ai dit vite, très vite : « Euh voilà, mes parents m’ont laissée ici, ils étaient en route pour Deauville et ils m’ont demandé de te demander si ça ne te dérangeait pas de me garder quelques jours parce qu’ils avaient des choses à faire à Deauville. »
Évidemment c’était pas honnête de ma part de pas lui dire la vérité mais je m’étais dit que si je lui disais que j’avais fait une fugue, elle était capable de ma virer avant même que je me mette un pied chez elle et j’avais vraiment envie d’avoir chaud et d’être dans du propre.
Elle a dit : « Bon, ben rentre, ma fille. »

Mamo donne à Stéphanie à boire du chaud et à manger et elle la fait coucher dans une petite chambre en haut de sa maison. Stéphanie tombe gravement malade.

J’ai été malade comme ça pendant je sais plus quoi, deux jours peut-être. Je tremblais tout le temps, je grelottais, j’avais mal aux yeux mal aux jambes mal au dos mal au reins mal à la tête mal aux dents mal partout, j’avais jamais été aussi mal fichue de ma vie. Je connaissais plus le jour de la nuit.
Mamo, elle s’occupait de moi. Elle venait dans la chambre, elle me prenait la tempé avec un thermomètre, elle me donnait du sirop et de l’aspirine et je buvais de l’eau, elle a pas dû me dire plus de dix mots en deux jours, c’était tout le temps la même phrase : « Eh bien dis donc ma fille, t’es pas bien toi. »

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