Главная страница «Первого сентября»Главная страница журнала «Французский язык»Содержание №4/2008

Arts et culture

Lialia KISSELEVA

Timour Moukanov : « Rien ne me prédisait ce destin »

Le groupe Acou existe depuis plusieurs années et il aurait pu être placé parmi toute une génération de groupes. Mais ce qui le fait trancher sur les autres, c’est que son leader, Timour Moukanov, écrit pour lui des textes ... en français !

Timour est venu dans notre rédaction avec une guitare et m’a fait un vrai concert. Puis on a parlé de son choix insolite.

– Pourquoi alors tu as choisi cette voie si difficile : écrire des chansons en français en Russie ?

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– De mon signe de zodiaque je suis Cancer. Et j’ai lu quelque part que les Cancers choisissent toujours les voies les plus difficiles. Cela s’est passé comme ça, je ne peux pas l’expliquer logiquement. Moi, je suis d’origine kirghize, je vis à Moscou, ma première langue étrangère c’était l’anglais et j’ai été un anglophile, je lisais des livres en anglais, Vonnegut, Irwin Shaw, Truman Capote, etc. À l’institut on n’avait que 6 heures de français et pour l’anglais c’était 3 fois plus. Ça marchait pas trop avec l’étude de français, on ne savait même pas le lexique indispensable. La musique française était aussi inconnue pour moi. Mais un jour mes amis m’ont fait connaître les chansons de Moustaki, Sardou, et comme ça j’ai connu pour la première fois la chanson française. Je dois avouer que j’ai eu une expérience ratée de l’interprétation de la chanson d’Adamo quand j’étais à l’école. On avait un groupe musical et pendant une soirée j’ai décidé de chanter Tombe la neige. Encore au début de la chanson j’ai compris qu’il ne fallait pas le faire... Pendant longtemps c’était l’objet des blagues de mes amis et j’aurais jamais cru qu’un jour j’allais écrire et chanter des chansons en français. J’aurais cru plutôt que j’allais partir dans l’espace. Rien ne me prédisait ce destin.

Après l’institut je travaillais beaucoup comme traducteur de l’anglais, puis comme manager, puis comme directeur de quelques projets. Mais en 1998 j’ai vécu une crise : c’était d’abord l’année de la mort de ma mère et l’année où j’ai quitté le travail où je gagnais beaucoup d’argent. J’ai senti que je ne suis pas à ma place, que je trompe moi-même. J’ai démissionné et je suis parti à Bichkek. J’ai vu ma mère et puis j’ai compris que c’était la dernière fois que je l’ai vue... Maintenant je comprends que je suis allé la revoir pour lui dire « adieu ». Je suis revenu à Moscou et j’ai commencé à travailler dans une agence de pub et là, j’ai commencé à écrire des revues de cinéma, comme je suis un cinéphile. Puis j’ai eu d’autres travaux et beaucoup d’événements dans ma vie. Et voilà qu’un jour, c’était, je crois, en 2002, j’étais tout seul dans ma chambre, je n’avais rien à faire, et tout à coup mon regard est tombé sur la guitare. Je jouait de la guitare très rarement et là, j’avais cet état étrange de spleen ou de mélancolie, de tristesse, quelque chose comme ça. J’ai pris la guitare et j’ai commencé à jouer une mélodie et je ne sais pas pourquoi j’ai senti que pour cette mélodie il fallait des mots en français. Et les mots en français sont venus. Je les ai écrits. Cette première chanson portait le titre Alice dans les villes. Dans quelques jours, j’ai fait encore une chanson. Puis j’ai eu des tourments d’amour et cela a fait naître tout un cycle des chansons d’amour. C’était une période difficile mais qui a donné beaucoup de chansons. Et puis, en 2004, j’apprends qu’il y aura une manifestation pour la défense du Musée de cinéma et j’y prends part, et on me propose de faire un petit concert. J’ai trouvé des amis-musiciens, une fille qui chantait et de là commence déjà notre activité de concerts. On a commencé à nous produire comme un groupe.

– Tu dis que tu parlais à peine français et que tu étais plutôt un anglophile. Mais tes textes sont très correctes du point de vue de la grammaire et le lexique est riche. Comment ça s’explique ?

Les Artistes

Paroles et musique :

Timour MOUKANOV

Quand j’étais à Strasbourg
Mon métier étais lourd –
Je devais faire l’amour
Sur un air de Gainsbourg.

Et quand j’étais en Chine,
Plus proche de mes racines,
J’tourmentais ma voisine
Aux soupirs de Birkin.

Quand j’étais en Provence
Chez un maître de dance.
J’ai su j’avais une chance,
Si je chantais Brassens.

Et à Saloniki
Je dansais Sirtaki
Avec une Grecque qui
Adorait Moustaki.

Je flanais argotier
Les sentiers floristiers.
Là j’ai vu le rentier –
Maxime Le Forrestier.

Je la cherchais partout –
Une jeune fille amadoue.
Elle murmurait surtout
Deux couplets de Sardou.

Sainte-Geneviève-des-Bois
Ne nous parvient qu’une
fois.
Là je pensais à toi,
Et à Claude François…

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– C’est d’abord à cause de mon aptitude d’apprendre facilement les langues comme je suis un traducteur de ma formation. Et aussi à cause de ce fait que dès mon enfance j’étais bilingue : je parlait russe et kirghize. Et puis dans les années 90 j’ai fait la connaissance d’un Français qui habitait près de moi. Chaque jour il passait me voir et j’essayais de parler français avec lui. Et puis je suis allé en France et là je vivais chez lui et aussi je lui parlais français. Je me suis « plongé » dans la langue. Et quant aux textes, la plupart des textes ont été corrigés par des amis. Et puis j’ai fait la connaissance de Pavel Tchesnokov, un Russe d’origine française, qui écoutait mes chansons et m’aidait à les corriger. Et quant à la prononciation, je peux dire, même si cela paraît étrange, que dans la langue kirghize il y a beaucoup de sons très proches à ceux du français, comme par exemple, eu, u. C’est pourquoi c’était pour moi facile. Avec l’anglais c’était le contraire : je passais de longues heures à travailler ma phonétique.

– Et d’où vient ce nom de ton groupe – Acou ?

– Cela vient de mon enfance. C’est comme ça qu’on m’appelait dans ma famille. Et puis quand je réfléchissais au nom de mon groupe j’ai décidé d’utiliser ce nom. Et puis c’est le mot « acoustique » en abrégé.

– Quel est votre public ? Est-ce qu’il vient beaucoup de Français, de francophones ?

– Tu sais, moi-même je n’ai pas toujours compris qui est notre public... Bien sûr, toujours il y a ce couple qui reste quelques minutes à écouter et puis qui part. Il y a des étrangers, un jour on a eu un groupe de Polonais à notre concert. Il y a des étudiants qui s’intéressent à la culture française. Il y a du public différent.

– Parmi les chanteurs français qui sont les plus vénérés pour toi ?

– Ça peut paraître étrange mais j’écoute très peu de musique française. Je peux même dire que je ne connais presque pas la chanson française. En revanche, personne ne peux me soupçonner de plagier. Mais j’aime beaucoup Dassin, Mathieu, Sardou, Moustaki, Adamo, Goldman, Souchon. Mais Gainsbourg est le chanteur que j’admire le plus, comme musicien, comme personnalité.

– C’est bien étrange quand même ! Tu es un anglophile, tu n’écoute presque pas la musique française, mais en même temps tu es parmi un très petit nombre des musiciens russes qui écrivent les chansons en français !

– Oui, cela m’est tombé du ciel, et on ne peut pas m’accuser de le faire pour une conjoncture. Je le fais parce que je ne peux pas ne pas le faire.

– Merci, Timour. Notre équipe te dit « bonne chance ! » et on espère assister à tes concerts dans l’année 2008.

Pour savoir plus sur le groupe Acou, visitez son site : www.acou.ru

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