Je vous salue, ma France
La Normandie
Les « hommes du Nord », les Normands, pirates Vikings venus de Scandinavie, ont donné leur nom à la Normandie. Aux IXe-Xe siècles, ils remontent l’estuaire de la Seine et menacent Paris. Leurs bateaux à fond plat, munis d’une rame et d’une voile carrée, terrorisent les populations. Ils ont à leur proue une tête de dragon appelée dans leur langue « drakkar ». Les Vikings conquièrent la Normandie. Ils vont jusqu’en Sicile et en Russie. Ce sont eux, les Varègues, qui fondent Novgorod et Kiev au IXe siècle.
Les Vikings sont à l’origine d’une histoire tumultueuse entre la France et l’Angleterre. Pour la comprendre, il faut aller à Bayeux et regarder une véritable bande dessinée de 70 mètres de longueur : la tapisserie tissée au XIe siècle par la reine Mathilde, épouse de Guillaume duc de Normandie, descendant des Vikings. Elle raconte en 58 scènes comment le roi d’Angleterre édouard choisit Guillaume comme successeur. Il envoie Harold pour lui annoncer la nouvelle. Celui-ci se met fidèlement au service de Guillaume, l’aide à vaincre aux frontières ouest de son duché les Bretons qui le menacent. Mais il le trahit, en se proclamant, à la mort d’édouard, roi d’Angleterre.
Pour faire respecter ses droits, Guillaume prépare une expédition et débarque en Angleterre. Harold est tué à la bataille d’Hastings. Guillaume le Normand devient Guillaume le conquérant : il est roi d’Angleterre !
On est en 1066. C’est le début d’une histoire compliquée entre les dynasties de France et d’Angleterre. L’épisode le plus célèbre est celui de la guerre de Cent ans (1337-1453) avec ses temps forts : la remise par les bourgeois de Calais des clés de la ville aux Anglais, immortalisée par le groupe sculpté de Rodin que l’on peut voir au musée Rodin à Paris ; la mort de Jeanne d’Arc, petite bergère venue de Lorraine pour aider le roi de France. Elle est capturée, vendue aux Anglais et brûlée comme sorcière sur la Grand-place de Rouen.
On est au cœur des grands mythes de l’histoire de France. Tout le monde sait ici que les Anglais ont aggravé leur cas en battant Napoléon à Waterloo et en le faisant mourir à petit feu à Sainte-Hélène ! Heureusement, ces mêmes Anglais sont venus deux fois lors de la Grande Guerre de 1914-1918 et de celle de 1939-1945, au secours d’une France en péril. Chacun se souvient ici du débarquement anglo-américain en juin 1944 sur les plages de Normandie.
Chargée d’histoire, la Normandie aligne ses forteresses, datant du Moyen Âge, aux frontières de l’Île-de-France : Givors et La Roche-Guyon. Elle aligne sur ses côtes les bunkers du « Mur de l’Atlantique » construit par les Allemands. Car les longues plages de Normandie, situées à proximité de Paris, ne sont pas réputées seulement pour leur villégiature. Il y a des plages populaires, proches de Paris, comme Le Touquet-Paris-Plage. Il y a les plages aristocratiques de Deauville, de Trouville et de Cabourg que fréquenta avec passion Marcel Proust. On peut encore voir sa chambre (et même y dormir une nuit !) au Grand Hôtel. Il y a l’arche et l’aiguille d’étretat peinte par Monet, et tant d’autres. Il y a les longs soirs d’été à marée basse où le sable et la pierre découverts sur des kilomètres laissent place à un espace infini. Il y a les criques où se nichent de petits ports de pêche, comme celui de Port-en-Bessin. Il y a les côtes rocheuses où l’on ramasse coquillages et crustacés, comme au long des falaises des Vaches Noires. Mais il y a aussi ces lieux de batailles meurtrières : la Pointe du Hoc, Arromanches, Ouistreham, rebaptisés par les alliés Omaha Beach, Utah Beach, Juno Beach, et devenus lieux de mémoire. Le mémorial de la Paix de Caen avec son musée de la guerre, les bunkers et réseaux de souterrains ouverts à la visite, le clocher de la petite ville de Saint-Pierre, l’église où reste suspendue l’effigie d’un soldat, sont à visiter.
La Normandie, c’est le pays du cidre, boisson pétillante et vivifiante, obtenue à partir de la fermentation de la pomme, celui du calvados, eau-de-vie plantureuse obtenue à partir de la distillerie du cidre. C’est le pays du bocage. Les arbres enclosent des parcelles de terre piquées de pommiers, parsemées de ces vaches normandes si reconnaissables. Elles ont des couleurs blondes, blanches et brunes, et côtoient des vaches blanches tachetées de noir. C’est le pays du lait, du « bon beurre » , de la crème fraîche mise à toutes les sauces, du fromage savoureux à pâte molle et odorante : le camembert, le pont l’évêque, le livarot. On y mange, comme en Bretagne, des crêpes, on y goûte de l’agneau élevé sur les prés, salés par la marée.
Le paysan normand est une figure de la littérature de la France du XIXe siècle : roué, bon vivant, allant à la messe le dimanche mais ne se dispensant pas de menus plaisirs. Un monde de propriétaires, de notaires, de curés de campagne, de petits bourgeois enrichis par les commerces locaux. Ce monde a été décrit avec réalisme par Flaubert et Maupassant. Les paysages n’ont guère changé. Le bourg Ry de Madame Bovary est toujours là, avec ses maisons à colombages et le magasin où était la pharmacie du père Homais, décrite dans le roman de Flaubert.
Au fond des vallons se nichent des maisons à murs de torchis (un mélange de galets et d’argile consolidé par des poutres de bois) et à toit de chaume, les solides manoirs en pierre calcaire, les lourds corps de ferme avec leur porche qui n’accueille plus les chevaux et les charrues, mais les tracteurs et les engins agricoles.
Les chevaux sont pourtant encore là. Soixante pour cent des chevaux pur sang, destinés à la course, sont élevés ici. Des dizaines de compétitions locales les opposent. Il y a les courses de Deauville et, chaque année, la célèbre vente de « Yearlings », poulains d’un an et demi, appelés au plus bel avenir sur les champs de course du monde entier… y compris de Russie.
De Rouen au Havre, la Seine coupe la Normandie en deux. Elle déroule des méandres qui s’enfoncent dans le calcaire. De puissantes péniches, de petits cargos de mer, remontent le courant jusqu’à Rouen. Ils sont parfois aidés par le mascaret, ce courant marin qui à marée haute pénètre le fleuve et crée un tourbillon mortel si l’on n’y prend garde.
Ici, à Villequier, Léopoldine, la fille de Victor Hugo et son mari se noyèrent, créant un chagrin immortel au poète. Leur maison est toujours là, au bord du fleuve. Elle se visite.
Franchir le fleuve n’est toujours pas simple. Il faut gagner l’un des trois grands ponts qui s’élèvent au-dessus de la Seine. Mais il est plus pittoresque d’attendre un bac à proximité de ces villages qui s’appellent « Caudebec » ou « Quillebeuf ». C’est dans ce dernier que Marguerite Duras a cherché le café de la Marine où les héros de son roman Emily L, le captain anglais et sa femme, ressassent leurs souvenirs.
C’est au long du fleuve que s’égrènent les sites romantiques des ruines gothiques des abbayes de Saint-Wandrille ou de Jumièges. Sur l’estuaire grondent des raffineries de pétrole du port du Havre. La ville du Havre a été reconstruite par l’architecte Perret, le « roi du béton ». Mais elle a gardé sa plage de Saint-Adresse que peignirent Claude Monet (La Terrasse au Havre, 1866), Raoul Dufy (Vue sur Saint-Adresse, 1924).
De l’autre côté de l’estuaire, avec vue sur les lumières du Havre, Honfleur est un véritable miracle conservé du XIXe siècle. Autour du bassin, animé essentiellement par des bateaux de plaisance, se pressent de hautes maisons étroites, la tour de la Capitainerie et derrière l’église Sainte-Catherine et son clocher de bois, tout un quartier où vécurent peintres et écrivains : Boudin, Monet, Corot , Dufy, Courbet, Pissarro, Musset, Baudelaire … et tant d’autres.
À voir aussi :
L’armade de Royan, grand rassemblement de voiliers mythiques et l’événement de l’été 2008.
Pour plus d’information, consultez : www.normandie-tourisme.org