Главная страница «Первого сентября»Главная страница журнала «Французский язык»Содержание №15/2008

Les Routes de l’Histoire

Les soldats russes en France (1916-1918)

« ...C’est avec le plus vif empressement que
je saisis toute occasion de rendre hommage à la
vaillance des Armées russes et de leur témoigner
ma profonde gratitude pour l’aide efficace qu’elles
ont apportée à notre armée, aux heures tragiques
où l’Allemagne jetait la totalité de ses forces vers
l’Ouest, afin d’écraser la Belgique, l’Angleterre et la France.
Je n’oublierai jamais les sacrifices très lourds
que l’Armée russe a héroïquement consentis pour
forcer à tout prix l’ennemi à se retourner contre elle. »

Maréchal Joffre,
Hommage à l’Armée russe

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Au terme d’accords signés en décembre 1915, la Russie avait accepté d’envoyer quatre brigades d’infanterie composées de 45 000 officiers et soldats, combattre aux côtés des troupes françaises. Équipés et armés par la France, portant le casque français frappé d’un aigle bicéphale, les soldats de la 1ère brigade débarquent à Marseille en avril 1916 et sont saluées par un chaleureux souhait de bienvenue du général Joffre : « Notre fidèle alliée, la Russie a voulu donner à la France un gage nouveau de son amitié, une preuve plus éclatante encore de son dévouement à la cause commune. Des soldats russes choisis parmi les plus braves et commandés par les officiers les plus réputés, viennent combattre dans nos rangs. Vous les accueillerez comme des frères ; vous leur montrerez quelle chaude sympathie vous réservez à ceux qui ont quitté leur patrie pour venir lutter à nos côtés. Au nom de l’armée française, je m’incline devant leurs drapeaux, sur lesquels s’inscriront bientôt les noms glorieux de communes victoires. »

img2Au début de 1917, les deux brigades du corps expéditionnaire russe ont occupé le Fort de la Pompelle près de Reims et se sont distinguées dans l’attaque du mont Spin au cours de laquelle elles ont subi de lourdes pertes. Après la révolution de février 1917, ces deux brigades ont connu des tensions opposant les soldats qui acceptaient de continuer de combattre en France et ceux qui voulaient cesser le combat et rentrer en Russie.

Après la révolution bolchevique et l’armistice de Brest-Litovsk, le gouvernement français offre aux soldats russes l’alternative suivante : ou bien ils acceptent de s’engager dans l’armée française ; ou bien ils acceptent de devenir des travailleurs militaires ; sinon c’est l’internement dans un camp en Algérie. Quelques 400 officiers et soldats russes ont décidé de continuer le combat jusqu’en 1918, dans une Légion russe de volontaires. Plus de 11 000 soldats russes ont accepté de travailler au service de l’armée française, et environ 4 800 ont été envoyés dans des camps en Algérie. La Russie a perdu pendant la Grande Guerre 6 000 000 d’hommes tués, morts, blessés et disparus.

Un épisode méconnu

(d’après René-Paul Savary,
Président du Conseil général de la Marne)

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L’arrivée du Corps expéditionnaire russe en Champagne est un épisode méconnu que l’histoire a injustement inconsidéré. Qui se souvient aujourd’hui de ces soldats, venus de la lointaine Russie, défendre notre territoire ? L’épopée tragique de ces soldats russes se croise avec notre patrimoine d’histoire militaire. Aujourd’hui à Saint-Hilaire-le-Grand, une chapelle et un petit cimetière couronnés de sapins rappellent le sacrifice de ces milliers d’hommes et symbolisent cette terre de Russie, à laquelle ces soldats songeaient avec nostalgie dans les tranchées aux abords d’une ferme au nom prémonitoire « L’Espérance »...


Le cimetière militaire russe de Saint-Hilaire-le-Grand1

(d’après Jean-Pierre HUSSON)

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Situé au lieu dit « L’Espérance », le site de Saint-Hilaire-le-Grand a été choisi pour honorer la mémoire des soldats russes tués sur les champs de bataille de Champagne. Le cimetière russe de Saint Hilaire-le-Grand, d’une superficie de 3 412 m2, où ont été inhumés 915 corps de soldats russes, est une nécropole nationale dont l’entretien est assuré par le secrétariat à la Défense chargé des anciens combattants. Des plaques en plastique portent le nom de chaque soldat avec la mention « mort pour la France ». En 1936-1937, à côté du cimetière ont été édifiés la chapelle et le monastère orthodoxes, sur l’initiative de l’Association des officiers russes anciens combattants sur le front français, créée en 1923 sous la présidence d’honneur du général Gouraud, qui avait commandé les armées de Champagne pendant la Première Guerre mondiale. L’Association du souvenir du Corps expéditionnaire russe en France a pris la suite en 1990 de cette association. Présidée par le prince Serge Obolenski, l’Association assure l’entretien et la garde de la chapelle commémorative, organise chaque année un pèlerinage annuel et participe à la cérémonie de la flamme du souvenir à l’Arc de triomphe à Paris.

Le corps expéditionnaire russe en France (1916-1918)

(d’après Serge Obolenski,
Président de l’Association du souvenir
du Corps expéditionnaire russe en France)

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Le rôle de la Russie dans la Grande Guerre est peu connu et mérite d’être brièvement rappelé. En 1891, sous le règne de l’empereur Alexandre III, la France et la Russie s’engagent à se porter une aide réciproque en cas d’agression d’une tierce puissance.

L’empereur Nicolas II confirme l’alliance lors de son voyage en France en 1896 et le président Félix Faure fait de même en Russie en 1898.

Conformément aux plans établis, la Russie lance une offensive en Prusse Orientale dès le début des hostilités, en août 1914, avant même que la mobilisation soit achevée ; ceci oblige les Allemands à transférer deux corps d’armée à l’Est, mais provoque des pertes russes importantes. Rappelons les nobles paroles du maréchal Foch : « Si la France n’a pas été effacée de la carte de l’Europe, c’est avant tout à la Russie que nous le devons... »

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C’est ainsi que la Russie envoie en France 40 000 hommes répartis en quatre brigades : deux partent combattre sur le front en France et deux autres à Salonique, sur le front d’Orient. La 1ère brigade russe est composée de deux régiments et comprend tant des bataillons de réserve que des officiers et des sous-officiers qui ont déjà combattu sur le front de l’Est. Elle est acheminée à travers la Sibérie vers Marseille ; les trois autres brigades passent au nord, par Arkhangelsk. En France elles vont combattre sur le front de Champagne, en Orient sur celui de Macédoine.

Il est important de rappeler le sacrifice de ces hommes venus de si loin. Les descendants de ceux qui sont restés en France après 1918 perpétuent leur mémoire au sein de l’Association du souvenir du Corps expéditionnaire : ils leur rendent hommage chaque année au cimetière militaire russe de Saint-Hilaire-sur-Marne.

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En 1917, la Révolution russe provoque un relâchement de la discipline parmi les soldats ; les brigades sont dissoutes mais, fidèles à leur engagement, les soldats les plus dignes entendent continuer à servir la cause commune ; cela permet de former une Légion d’honneur russe qui sera incorporée à la 1ère division marocaine et envoyée au front en mars 1918.

Cette légion se distingue dans tous les combats, jusqu’à la victoire. Les pages glorieuses écrites sur notre sol par les volontaires russes et par les brigades spéciales sont autant de lettres de noblesse qui enseignent à ceux qui restent et à leurs enfants le chemin d’un devoir auquel ils ne sauraient faillir.

Le sang déjà versé par les leurs sur la terre de France, les sacrifices héroïques qu’ils consentirent pour l’idéal commun, sont autant d’assurances formelles de l’idéal commun.


1 Il a été entièrement rénové en 1998 : réfection des croix et inscriptions, plantations, signalétique.

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