Главная страница «Первого сентября»Главная страница журнала «Французский язык»Содержание №7/2009

Arts et culture

Marie BORISSENKO

Les origines russes d’Angélique, Marquise des Anges

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Simone Changeux et Vsevolod Goloubinoff

Il était une fois une jeune Française qui s’appelait Simone Changeux. Elle avait à peine vingt ans quand la Seconde Guerre mondiale a commencé. Simone a décidé alors de s’échapper d’un Paris occupé par l’armée allemande et de traverser, en vélo, la France jusqu’à la frontière espagnole. Elle a été arrêtée en zone libre mais a su atteindre son but. Puis elle est revenue à Versailles où elle habitait pour continuer à écrire parce que c’est l’écriture qui était sa vraie passion. Après avoir remporté un prix littéraire elle a décidé d’aller au Congo pour écrire des articles sur la décolonisation. Elle avait alors vingt sept ans. Et c’est là qu’elle a rencontré Vsevolod Goloubinoff, son aîné de 18 ans. Cet aristocrate russe étais né à Boukhara, en Ouzbékistan dans la famille du consul du tsar en Perse. À 15 ans, il avait entrepris un voyage en solo à travers la Russie et la Perse. À 16 ans, il avait quitté la Russie pour toujours et avait rejoint ses parents réfugiés en France au moment de la révolution de 1917. Il parlait de 11 à 16 langues. À 20 ans, il est devenu le plus jeune docteur en sciences de France. Géologue et chimiste de renom, il prospectait des mines d’or en Asie et Afrique. En 1948, Serge Goloubinoff et Simone Changeux se sont mariés. C’est ensemble qu’ils sont retournés en France et ensemble qu’ils se sont mis à écrire. Tous les deux adoraient l’aventure. Sous le nom de plume d’Anne et Serge Golon ils ont écrit le premier livre (il y en aura 13) sur Angélique, en ouvrant la saga d’Angélique, où l’on retrouvait bien des similitudes entre les auteurs et leurs héros. Angélique, Marquise des Anges fut un succès immédiat. Elle est vite devenue la série-culte des années soixante.

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En 1964, alors que sept tomes étaient déjà parus, le cinéma a pris le relais. C’est l’année du tournage d’Angélique, Marquise des Anges. En 1966 est tourné La Merveilleuse Angélique. On a mis enfin un visage sur le nom d’Angélique – celui de l’actrice Michèle Mercier – tandis que Robert Hossein a incarné son époux, Joffrey de Peyrac. Là encore le succès fut immense, dû pour beaucoup au charme noir du diable boiteux du cinéma français – Robert Hossein.

Son vrai nom est Robert Hosseinhoff. Son père était compositeur connu d’origine persane – il serait né à Samarkand en Ouzbékistan – et sa mère était pianiste d’origine russe. Cette ascendance orientale a toujours poussé Robert vers ceux avec qui il pouvait partager le sentiment d’appartenance à la terre de ses ancêtres.

Enfant, il a suivi des cours orthodoxes dans lesquels il a découvert l’éclat des messes russes. Puis, réfugié, pendant l’Occupation, dans un foyer russe, dirigé par un ancien général du tsar, il est devenu un fidèle assidu de la messe. Il a très tôt fréquenté des cours de théâtre dont ceux de Tania Balachova. Sa première femme était Marina Vlady, qui lui a donné deux fils – Piotr et Igor, et avec laquelle il s’est marié pendant le tournage du Crime et Châtiment (1956).

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Robert Hossein

Robert Hossein a tourné cinq films avec Roger Vadim (de son vrai nom Roger Vladimir Plemiannikov, fils d’un ancien aristocrate ukrainien naturalisé français). En 1967, Hossein a tourné J’ai tué Raspoutine. Apprenant que vivait encore à Paris le prince Youssoupoff qui avait participé à l’assassinat de Raspoutine, il a écrit, a partir du récit authentique du meurtrier, un scénario de film. Face à la caméra, le vieux monsieur exilé entreprend de raconter les faits. Avec cet authentique drame historique où il s’est réservé le petit rôle de Serge Soukhotine, ami de Raspoutine, Hossein a mis en scène la mort violente de l’empire des tsars. « Tous les Russes blancs de Paris avaient défilé pour jouer dans le film », se souvient aujourd’hui Katia Tchenko (citée dans le livre Robert Hossein. Le Diable boiteux de Henry-Jean Servat).

Acteur et metteur en scène connu, Robert Hossein a tout abandonné et est parti en 1971 pour Reims où il a organisé le Théâtre populaire de Reims et le Théâtre-École. Ses premières mises en scène rémoises (1971-1972) étaient Crime et Châtiment de Dostoïevski et les Bas-Fonds de Gorki (repris à l’Odéon à Paris).

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Scène du film Angélique

De retour à Paris il a monté une série de spectacles inoubliables au palais des Sports, dont Angélique (1996). Il est resté à jamais marqué par son rôle d’alchimiste boiteux dans la saga d’Angélique en avouant une grande nostalgie pour ce personnage « à la Dostoïevski ».

Encore aujourd’hui dans l’interview donnée à la télévision russe (janvier, 2008), Robert Hossein, qui a 80 ans, essaie de parler russe et a les larmes aux yeux en se souvenant de ses rencontres russes. Pour lui, tout ce qui est romantique, tendre et indomptable, est russe. Il parle de l’esprit russe de l’histoire d’Angélique et de son mari sans savoir que l’un des auteurs était un scientifique et un peintre qui s’appelait Serge Goloubinoff.


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Scènes du film Angélique (ici et en haut)

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