Arts et culture
Lialia KISSELEVA
Instinct de mort
Jacques Mesrine et son épouse Soledad
À voir absolument, de plus que le film a reçu le César pour le meilleur acteur qui est cette année Vincent Cassel. D’ailleurs, Cassel n’a pas besoin d’être présenté : ces rôles parlent pour lui. Avec un physique pas vraiment très définissable si on parle des clichés du cinéma, il a su devenir aussi sinon encore plus connu que son père, le célèbre Jean-Pier Cassel.
Pour Instinct de mort Cassel le maigre a dû grossir et c’est vraiment dur de reconnaître dans son personnage de Mesrine – un type bedonnant et parfois moustachu, un Clyde Barrow à la française – ce grand garçon extrêmement romantique de l’Appartement de Gilles Mimouni ou un mafioso russe et en même temps homo latent de Eastern promises. Où le Pan affreux de Sa Majesté Minor. Dans Instinct de mort Cassel montre un jeu de génie. À vrai dire, ce film n’est que la première partie d’une dilogie, dont la deuxième porte le titre Ennemi public (au box-office russe Враг государства №1 и Враг государства №1: Легенда). La première partie montre les crimes de Mesrine, gangster des années 70. La deuxième nous fait part de ses motivations et de sa philosophie.
Le film est fondé sur les événements réels.
Jacques René Mesrine (né le 28 décembre 1936 à Clichy-La-Garenne, tué par la police le 2 novembre 1979 à Paris) est un gangster français ayant opéré principalement en France mais aussi au Canada et un peu en Espagne. Il est surnommé « l’homme aux mille visages » ou à tort, de son propre aveu, « le Robin des Bois français ». Déclaré « ennemi public n° 1 » au début des années 1970, il est notamment connu, en France, pour des braquages médiatisés et pour ses évasions.
Pendant la guerre d’Algérie Mesrine a été engagé comme parachutiste-commando. Jacques René Mesrine sera décoré par le général de Gaulle de la Croix de la valeur militaire. D’après ses proches, l’expérience de l’Algérie l’a profondément marqué. (Il aura été de nombreuses fois de « corvée de bois », c’est-à-dire l’exécution finale des torturés, des prisonniers).
Il participe à de nombreux cambriolages dès l’âge de 23 ans avec son ami. Ici commence une longue histoire de ses crimes, de ses tentatives d’arrêter la vie criminelle, des arrêts, des incarcérations, des évasions...
Le 6 février 1968, il fuit au Canada avec Jeanne Schneider, maîtresse rencontrée après son divorce. En juillet 1968, les deux arrivent à Montréal. Le couple rentre au service d’un milliardaire handicapé, Georges Deslauriers, qu’il enlève le 12 janvier 1969, après avoir été renvoyé et demande une rançon de 200 000$ à son frère. Mais Georges Deslauriers réussit à s’échapper. Dès lors, Mesrine se lance dans la grande criminalité. En fuite aux États-Unis, Mesrine est arrêté à Texarkana, dans l’Arkansas, et extradé vers le Canada. À sa sortie d’avion, il fanfaronne devant les journalistes. Accusé de meurtre et de kidnapping, Mesrine se retrouve à la une des journaux québécois. Il est déclaré ennemi public n° 1.
En 1972, il retourne en France, où il commet différents braquages. En mai 1973, il est condamné en France à 20 ans de prison.
Le 6 juin, il doit comparaître pour une petite affaire de chèques sans provisions mais il s’évade du tribunal de Compiègne en prenant en otage le président du tribunal, grâce à une arme dissimulée dans les toilettes par un complice.
Il est arrêté par le commissaire Robert Broussard une première fois le 28 septembre 1973, à son appartement rue Vergniaud dans le XIIIe arrondissement de Paris. Cette arrestation reste célèbre puisque le truand ouvrit la porte aux policiers après vingt minutes de négociations à travers la porte, cigare aux lèvres et offrit le champagne au commissaire. Mesrine plaisante avec Broussard : « Tu ne trouves pas que c’est une arrestation qui a de la gueule ? »
C’est durant ce séjour en prison qu’il écrit son autobiographie L’Instinct de mort, qui paraît en février 1977. Dans ce livre, il déclare avoir tué 39 personnes. Le 19 mai 1977, Mesrine est condamné à 20 ans de prison pour attaques à main armée, recel et port d’armes par le juge Petit. Durant ce procès, il se produit une anecdote célèbre : il lance les clefs de ses menottes à la figure des juges pour prouver la corruption de la police et de la justice. Il est transféré au quartier de haute sécurité de la prison de la Santé. Son incarcération au QHS de la prison de la Santé est à l’origine d’un combat médiatique qu’il entend mener afin de les faire supprimer, décrivant les conditions de détention qu’il juge dégradantes. Il y rencontre Charlie Bauer, un révolutionnaire d’ultra gauche, qui devient son bras droit. Il parvient à s’évader le 8 mai 1978, accompagné de François Besse. Grâce à des complicités au sein de la prison (qui introduiront des armes à leur attention), Mesrine et Besse parviennent à neutraliser leurs gardiens, escaladent le mur d’enceinte et s’évadent de cette prison réputée inviolable.
Le 26 mai 1978, il braque le casino de Deauville avec son compagnon de cavale, François Besse. Le braquage tourne mal, faisant deux blessés, mais les deux évadés parviennent à fuir. C’est à cette période qu’il se met à écrire son deuxième livre, Coupable d’être innocent, plus politique que le premier, qui paraîtra après sa mort en 1979. Il continue les braquages, tandis que la police poursuit ses efforts pour le localiser. La police craint le pire.
Vincent Cassel dans le rôle de Mesrine
Deux jours plus tard, une vaste opération est déclenchée pour tenter de retrouver Besse et Mesrine. Plus de 300 gendarmes, ainsi qu’une section du GIGN assistée de policiers de la brigade antigang sont déployés pour les rechercher, en vain. Mesrine nargue les autorités en donnant des entretiens à des journalistes. Ainsi à Paris Match, le 4 août 1978, Isabelle Peltier reçoit ses déclarations. Il se montre menaçant envers quiconque voudrait tenter de l’arrêter. Il veut abolir les quartiers de haute sécurité (QHS) et va jusqu’à menacer Alain Peyrefitte, ministre de la Justice de l’époque. Sa notoriété entraîne une guerre des polices entre Lucien Aimé-Blanc, chef de l’OCRB, et Robert Broussard, chef de l’antigang, pour l’arrêter.
Le 21 juin 1979, il enlève le milliardaire Henri Lelièvre avec la complicité du braqueur Michel Schayewski et obtient une rançon de six millions de francs. Dès lors, il devient l’ennemi public n°1 en France. En août, une unité anti-Mesrine est créée.
Le 10 septembre 1979, Mesrine tend un guet-apens au journaliste de Minute Jacques Tillier, le torture, le blesse grièvement par trois balles en lui tirant dans la joue, le bras et la jambe. Il le laisse pour mort. Mesrine reprochait à ce journaliste de l’avoir diffamé en écrivant qu’il n’était pas une personne « réglo » avec ses associés en août 1979.
Fin octobre 1979, les hommes du commissaire divisionnaire Lucien Aimé-Blanc, chef de l’Office central pour la répression du banditisme (OCRB), repèrent l’appartement de Mesrine. Le vendredi 2 novembre 1979 à 15h15, Mesrine, au volant de sa voiture avec sa compagne Sylvia Jeanjacquot, est encerclé par les hommes de la BRI, porte de Clignancourt à Paris. Un camion bâché, qui s’est inséré devant son véhicule, dissimule des tireurs qui ouvrent le feu sur lui et sa compagne. Vingt-et-une balles sont tirées. Sa compagne, grièvement blessée, perd un œil dans la fusillade.
La mort de Mesrine est un premier cas de remise en cause de la légitime défense vis-à-vis de la police, qui aurait ouvert le feu sans sommation. Plus tard deux témoins ont affirmé qu’il n’y avait pas eu de sommations du côté de la police et certains disent que c’était un meurtre sans jugement.