Je vous salue, ma France
Lialia KISSELEVA
« La Provence odorante, et de Zéphyre aimée... »
La Provence, terre bénite – c’est ce que l’on entend de ceux qui l’ont visitée. Mais qu’est-ce qu’il y a là de si particulier, de si spécial ?... Pourquoi on reste charmé par ce pays pour toute la vie ? Peut-être on pourra le comprendre en examinant bien cette partie de la France, en commençant par son histoire...
Le nom de la Provence vient du latin, parce que, dans l’Antiquité, elle a fait partie de la province romaine transalpine dénommée Provincia Romana. Mais avant les Romains c’étaient les Grecs qui l’ont colonisée au VIe siècle avant J.-C. Et avant les Grecs, la région a été habitée par les Celtes. Mais les Romains y sont restés le plus longtemps. Et on les comprend bien…
C’est la ville de Marseille, assaillie par les pirates ligures, qui a demandé l’aide de la Rome, en 181 av. J.-C. Marseille elle-même a été fondée vers 600 av. J.-C. par les marins phocéens – Grecs venus de Phocée, en Asie. Les Romains ont bien aidé à chasser les Ligures et ont fondé une Provincia.
Après la chute de l’Empire romain, la Provence a vécu plusieurs invasions germaniques. Enfin, vers l'an 879 après J.-C., la région fut incorporée à la Bourgogne Cisjurane, et elle fut ensuite intégrée au royaume d'Arles au Xe siècle. D’ici commencent les nombreuses divisions de la région, connue aujourd’hui sous le nom de Provence-Alpes-Côte d’Azur. Le territoire de Provence actuelle se divisait en comté de Provence et marquisat de Provence. Les autres territoires autonomes étaient : Comté de Forcalquier, Comtat Venaissin, Principauté d'Orange et baillie d'Outre-Siagne (futur comté de Nice). On les divisait, on les unifiait, on rattachait la Nice, on faisait la guerre pour la rattacher à la France et ainsi de suite. Dans les années 880, la basse Provence devient champ de bataille avec les Sarrasins qui pillaient la région. Mais ces batailles sont aussi une occasion pour les féodaux de soumettre la Provence dont l'aristocratie et les communautés urbaines et paysannes ont jusque là toujours refusé la mutation féodale et le pouvoir comtal. C’est comme ça que vers 975 a été créée la féodalité provençale avec Arles en capitale. Après quoi, pendant plusieurs siècles, grâce aux mariages entre les filles et fils des différentes comtés et principautés, formant en tout la région PACA, peu à peu la Provence est devenue à peu près ce que l’on connaît aujourd’hui sous ce nom. Mais il y a toujours un schisme parce que Nice est toujours une pomme de discorde entre la France et la maison de Savoie. Et c’est au XVe siècle que la Provence a connu le règne bénéfique du bon roi René. On l’appelle « le roi » à cause de plusieurs titres accumulés par lui : il était seigneur puis comte de Guise, duc de Bar, duc consort de Lorraine, duc d'Anjou, comte de Provence et de Forcalquier, roi de Naples, roi titulaire de Jérusalem et d'Aragon ainsi que Pair de France.
Au XVIe siècle, la Provence participe aux guerres de religion et ne veut reconnaître Henri IV comme roi qu’après son abjuration en 1594.
La grande peste vient dans la région en 1720. En deux années, elle dévaste le pays. Nous pouvons toujours voir les figurines des saints sur les murs des maisons provençales – un souvenir de cette époque dure, où les gens avaient peur de s’éloigner de leurs maisons mais en même temps avaient une forte nécessité de prier et demander grâce à Dieu...
« La Provence est fort pauvre. Il ne lui reste plus que des jasmins et des orangers. On peut l’appeler une gueuse parfumée. »
Antoine GODEAU
Lors de la révolution française, la Provence fut divisée en trois départements : Bouches-du-Rhône, Var et Basses-Alpes. Elle retrouve le Comté de Nice en 1793 qui donne naissance au département des Alpes-Maritimes avant de repasser sous le contrôle piémontais et sarde. En 1860, suite à un référendum populaire, le rattachement définitif du Comté de Nice à la France ramène Nice à la Provence. Quelques territoires alpins du Comté restent cependant italiens jusqu´en 1947 où un nouveau référendum plébiscite leur rattachement à la France, mettant un terme à près de 7 siècles de schisme de la Provence.
« Il n’y a pas de Provence. Qui l’aime aime le monde ou n’aime rien. »
Giono JEAN
Pendant la Seconde Guerre mondiale, en 1944, en Provence a été effectuée une opération militaire « Dragoon » menée par les troupes Alliées dans le sud-est de la France (entre Toulon et Cannes). Grâce à ce débarquement, la Provence a été libérée en deux semaines.
En Provence, tout semble être au maximum
La Provence est une terre unique, qui attire par son histoire, ses grands hommes, sa cuisine, et son climat, qui bénéficie de la Méditerranée. Un Anglais, Peter Mayle, a été tellement charmé par la Provence, qu’il a quitté son pays, lui et sa femme ils ont acheté une maison en Provence et ont commencé une nouvelle époque de leur vie. Mayle a écrit plusieurs livres sur la Provence, surtout sur sa cuisine. En ce qui concerne le climat, Mayle a été bien surpris de découvrir que le climat provençal est aussi varié que sa cuisine : « La Provence constitue un tel choc pour l'organisme septentrional : tout y est vigoureux. Les températures sont extrêmes, frôlant les quarante degrés pour descendre jusqu'à moins dix. La pluie quand elle survient, tombe avec un tel entrain qu'elle emporte les routes et oblige à fermer l'autoroute. Le mistral est un vent brutal, épuisant, d'un froid mordant en hiver, dur et sec en été. La nourriture est gorgée de fortes saveurs de terroir un peu dures pour un système digestif habitué à un régime moins capiteux. Le vin est jeune et trompeur : il se boit facilement, mais il a parfois un degré d'alcool supérieur à celui de crus plus vieux qu'on aborde avec prudence. Il faut du temps pour s'habituer aux effets combinés de l'alimentation et du climat... Il n'y a rien de doux en Provence... » (Peter Mayle, Une année en Provence)
Si on parle du mistral, il faut dire que c’est un habitant d’honneur de la Provence. Dans la tradition provençale, le mistral est l'un des trois fléaux de la Provence, les deux autres fléaux étant la Durance et le Parlement de Provence. Généralement sec et glacial, qui mène l'air froid venu des pays alpins, et accompagné d'un temps très ensoleillé, son caractère dominant lui confère un rôle important dans l'originalité du climat provençal. Le mistral souffle environ 130 jours par an, avec une vitesse variant entre 30 et 120 km/h, en rafales. Il a un effet très néfaste sur les cultures et se montre dévastateur lors des incendies. C'est en Camargue qu'il peut être le plus violent. De même, en Provence, on a coutume de dire que lorsqu'il souffle, le vent peut déplacer les pierres de la plaine de la Crau. Malgré tout, le mistral est un vent apprécié des provençaux, car il purifie l'air et éclaircie le ciel lorsque apparaissent les nuages ! Les anciens le connaissaient : il souffle, disaient-ils, 3, 6 ou 9 jours de rang. Un proverbe est même plus précis, annonçant que s'il se lève dans la journée, il dure trois jours, s'il se lève la nuit sa durée est celle d'un pain cuit. Le mistral est capable de bien pire, avec un record dans les chroniques de quatorze mois sans discontinuer entre janvier 1769 et février 1770.
« La Provence odorante, et de Zéphyre aimée,
Respire sur les mers une haleine embaumée,
Au bord des flots couvrant, délicieux trésor,
L’orange et le citron de leur tunique d’or ;
Et plus loin, au penchant des collines pierreuses,
Forme la grasse olive aux liqueurs savoureuses,
Et ces réseaux légers, diaphanes habits,
Où la fraîche grenade enferme ses rubis. »
André CHENIER
La Provence a été chantée par beaucoup d’artistes : Daudet, Jean Giono, Henri Bosco, Marcel Pagnol, Yvan Audouard, Pierre Magnan, Jean-Yves Royer – et j’en passe – ont lié leurs œuvres avec la Provence. Sans parler des peintres, comme Cézanne ou Van Gogh, ou cinéastes (n’oublions pas que le film le plus célèbre des frères Lumière, L’Arrivée du train, a été filmé à La Ciotat). Et c’est pas étonnant du tout ! Ce pays inspire avec sa lumière, avec ses odeurs, avec ses couleurs et même avec ses sons...