Les Routes de l’Histoire
La France face à la Seconde Guerre mondiale
Adolf Hitler
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«Les soldats allemands ont de nouveau pris positions sur le Rhin ! » Telle fut la nouvelle qui effraya la France, le 7 mars 1936. Le traité de Versailles de 1919 avait obligé les armées allemandes à quitter la région du Rhin, comme garantie de la paix. Maintenant, Adolf Hitler défia la France. Il avait bien choisi son moment. Les politiciens français, occupés par des luttes internes, se trouvaient à la veille d'élections importantes. Comme l'opinion publique était pour la paix, aucun parti ne prêcha une réaction armée de la France. On se contenta d'une protestation officielle.
Les partis du gauche, rassemblés en un grand Front populaire, gagnèrent les élections. Léon Blum devint Premier-ministre. Bientôt des accords sociaux changèrent la vie de millions de Français : 12 % d'augmentation des salaires, la semaine de 40 heures et les congés payés. Hitler sur le Rhin ? Oh, il n'osera jamais aller plus loin !
Hélas, de nouvelles ombres s'étendirent sur l'Europe. En Espagne, une guerre civile effroyable éclata. Le général Franco trouva de l'appui dans le fascisme européen. De l'Allemagne, Hitler envoya des avions : ils écrasèrent sous les bombes entre autres la ville de Guernica (épisode que Picasso, révolté, évoqua dans un tableau célèbre). De l'Italie, Mussolini, soutient Franco par l'envoi de 75 000 hommes et 2 000 canons. Le gouvernement français, divisé sur l'affaire, préféra la non-intervention. Franco gagna. En 1937, face aux problèmes économiques, le gouvernement de Léon Blum dévalua le franc de 30 %. Une nouvelle Exposition universelle à Paris aurait dû relever la fierté de la France. Mais tandis que le pavillon de l'Allemagne s'élevait rapidement dans toute sa splendeur, celui de la France restait un chantier bloqué par des grèves. L'Exposition commença avec trois semaines de retard. Finalement, Blum dut démissionner. Le reste de 1937 et le début de 1938 furent marqués par plusieurs tentatives de nouveaux cabinets, qui tous échouèrent.
Profitant de la faiblesse politique de la France et de l'attitude hésitante de la Grande-Bretagne, Hitler risqua un nouveau coup : le 12 mars 1938, ses troupes entrèrent en Autriche et le pays devint simplement une partie de l'Allemagne. Cette fois, les Français et les Anglais prirent sérieusement peur. À Paris, une grande majorité du parlement donna sa confiance à Édouard Daladier comme Premier-ministre. Mais Hitler continua à poser ses exigences : il lui fallait maintenant une partie de la Tchécoslovaquie, habitée par des Allemands. Une grande angoisse s'abattit sur la France : le conflit international semblait inévitable. La France appela 400 000 hommes sous les armes. Les images horribles de la Grande Guerre, celle de 1914-1918, hantaient les esprits. Comment éviter la catastrophe ?
Pablo PICASSO, Guernica
Dernier espoir : une conférence des Quatre – l'Allemagne, l'Italie, la France et la Grande-Bretagne. À Munich, Hitler et Mussolini rencontrèrent les Premiers-ministres anglais et français, Neville Chamberlain et Edouard Daladier. Pour sauver la paix, Chamberlain et Daladier cédèrent. La mort dans l'âme, Daladier rentra à Paris. Mais à l'aéroport, une foule immense l'acclama comme un héros qui avait sauvé la paix internationale. Pour l'illusion de cette paix, on fermait les yeux sur le reste et sur l'avenir.
À peine un an plus tard, le 1er septembre 1939, Hitler attaqua la Pologne. Cette fois, tout espoir était perdu. La France et la Grande-Bretagne déclarèrent la guerre à l'Allemagne. Mais on hésita sur la meilleure stratégie. L'armée française se mit dans une position d'attente le long de la frontière avec l'Allemagne. Pendant huit mois, elle y tourna en rond dans ce qu'on a appelé la drôle de guerre, sans action, sans entraînement à une attaque allemande éventuelle. On croyait à l'efficacité de la ligne Maginot, mais celle-ci s'arrêtait à la frontière belge. Les armes françaises étaient démodées, l'aviation de combat encore en chantier, le commandement militaire hésitant. Des troupes britanniques vinrent renforcer l'armée alliée, mais les communications pour coordonner les efforts français et anglais étaient loin d'être idéales.
Le 26 août sur
les Champs-Elyssées
Source : Paris Match,
photo par R.Capa
Et puis soudain, le 10 mai 1940, Hitler lança à l'attaque, par la Belgique et le Luxembourg, 400 000 hommes, appuyés par 3 500 avions. La ligne Maginot, ce formidable mur entre la France et l'Allemagne, ne servit à rien car Hitler l'évita en passant par le nord, violant sans scrupules la neutralité de la Belgique.
Les généraux alliés avaient bien sûr toutes sortes de tactiques, héritées de l'expérience de 1914-1918. Mais ils comprirent vite que rien n'était plus comme dans la Grande Guerre. Les avions allemands, les terribles Stukas, piquaient de derrière les nuages avec un bruit d'enfer, semant la panique.
Les fleuves et les canaux n’arrêtaient pas l’avance des ennemis, car ceux-ci installèrent en quelques heures des ponts artificiels, livrant passage à leurs Pänzer Tanks qui coupèrent droit dans les lignes alliées. En outre, huit millions de civils fuyaient devant les Allemands, bloquant les routes, ajoutant au désespoir d'un monde qui s'écroulait.
Fin mai, les Allemands avaient poussé une grande partie des forces alliées contre la mer. Dans une des plus tragiques batailles de cette période, 350 000 hommes encore purent s'embarquer à Dunkerque et gagner l'Angleterre. Quinze jours plus tard, les troupes d'Hitler entrèrent dans Paris. Tout le Nord était maintenant entre leurs mains. Déjà 130 000 soldats français avaient trouvé la mort.
Le 17 juin 1940, un homme de 84 ans prit la parole à la radio française : c'était le maréchal Philippe Pétain, héros de la Grande Guerre, vainqueur de Verdun, qui jouissait d'un énorme prestige. Nommé Premier-ministre le jour même, Pétain demanda l'armistice pour sauver le reste de la France : « C'est d'un cœur serré que je vous dis aujourd'hui qu'il faut cesser le combat. »
Pourtant, pendant que Pétain parlait, un homme volait en secret vers l'Angleterre : le général Charles de Gaulles. Le lendemain déjà, à la radio de Londres, il lançait son appel du 18 juin 1940, contre Pétain et l'armistice : « La France a perdu une bataille !! Mais la France n'a pas perdu la guerre !... Notre patrie est en péril de mort. Luttons tous pour la sauver ! ». Toutefois de Gaulle était encore un inconnu, et pour le moment, éloigné de la France.
Les conditions allemandes pour l'armistice furent sévères : la moitié nord de la France fut occupée, la moitié sud devenait une zone libre ; la France pouvait garder une petite armée symbolique et quelques navires ; mais surtout, presque deux millions de soldats français restaient prisonniers en Allemagne.
Dans ces heures tragiques, les Français placèrent leurs espérances entre les mains de Pétain, qui installa son gouvernement à Vichy, dans la zone libre. Convaincu que la défaite était due à la faiblesse politique de la France, le vieux militaire s'engagea dans une forte politique de droite. Les grands thèmes furent Travail, Famille, Patrie. Sans doute Pétain et ses ministres étaient animés des meilleures intentions. Sans doute pensaient-ils que les Allemands quitteraient bientôt le territoire français et que tout rentrerait dans l'ordre. Mais la guerre continuait ailleurs et devenait mondiale.
Entrée des drapeaux dans le stade de Nuremberg, le « jour du parti », le premier célébré depuis l’arrivée de Hitler au pouvoir, le 2 septembre 1933
Source : Les Collections de l’Histoire
Le gouvernement de Vichy prit des décisions de plus en plus malheureuses. Quand les premiers Résistants commirent des attentats contre les Allemands, Pétain permit à la police française de collaborer avec la Gestapo pour trouver ces « terroristes de gauche ». Ensuite il fut d'accord pour envoyer en Allemagne des ouvriers français en échange de soldats prisonniers. Mais la pire mesure de Pétain fut le statut des Juifs. Voulant rendre la France aux Français, le gouvernement de Vichy exclut les Juifs des fonctions publiques et de l'armée. Les Juifs étrangers furent groupés dans les camps. Cet antisémitisme facilita grandement les répressions horribles des Allemands contre les Juifs.
La Résistance avait besoin de s'organiser plus efficacement. De Londres, le général de Gaulle confia cette tâche à Jean Moulin. Des réseaux secrets s'établirent. Des milliers d'hommes et de femmes, dans l'angoisse la plus profonde et avec des risques énormes, entreprirent de cacher des Juifs, de sauver des aviateurs descendus, de passer des informations à Londres, de publier des journaux clandestins, de saboter des chemins de fer. Sans cesse, la Gestapo chercha ces héros inconnus. De 1941 à 1944, elle en trouva 20 000, qui furent torturés et exécutés, dont Jean Moulin.
En novembre 1942, le vent se mit à tourner. Les Alliés débarquèrent en Afrique du Nord. Pour faire face au danger qui les menaçait du côté de la Méditerranée, les Allemands envahirent la zone libre. Le gouvernement de Vichy n'était plus qu'un théâtre d'ombres politiques, dominé par Hitler. En 1943, l'Union soviétique passa à l'offensive sur le front est. Toute l'attention de la France se porta maintenant vers l'ouest, d'où devait venir le débarquement allié tant attendu. Le 6 juin 1944, des milliers de navires sortirent du brouillard devant les côtes de Normandie. La libération avait commencé ! Paris accueillit les troupes alliées le 24 août. La guerre durerait encore un an. Mais pour la France, derrière l'horreur des combats, se dessinait déjà la statue de son nouveau chef : Charles de Gaulle, que les populations acclamèrent avec ferveur et qui allait refaire de la France une grande nation.
(d’après Éventail 7)