Arts et culture
Nadar, portraitiste de son époque
Écrivains, musiciens, journalistes, scientifiques, architectes : toutes les célébrités du Paris de la seconde moitié du XIXe siècle passèrent par l’atelier du photographe, boulevard des Capucines. L’artiste réalisa plus de 300 clichés d’eux : 60 sont exposés à la Fondation Prouvost de Marc-en-Barœul.
Lorsque Gaspar-Félix Tournachon voit le jour, en 1820, la photographie en est encore à ses balbutiements : la première épreuve photochimique, œuvre de Nicéphore Niepce, date de 1816.
En 1837, âgé de 17 ans, Gaspard-Félix, entreprend des études de médecine qu’il interrompt rapidement pour tâter du journalisme avant de devenir caricaturiste. Dès sa vingtième année, il prend le nom sous lequel la postérité le connaîtra, celui de Nadar.
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NADAR, Portrait de George Sand
En 1854, il commence à s’intéresser à la photographie qui a fait de notables progrès. Nadar améliore le procédé et fait paraître, en mars 1854, son Panthéon Nadar, une lithographie reproduisant les portraits de 300 écrivains. Cette œuvre n’a rien de fortuit : dès le départ, Nadar s’engage dans la voie à laquelle il demeurera fidèle, traitant par la photographie l’image de ses contemporains.
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NADAR, Pierrot
L’ensemble de photographies ne donne pas une impression d’instant figé, sans doute parce que ces photographies sont des œuvres d’art avant d’être des images. Le spectateur se trouve ici confronté à un vrai portrait, d’ailleurs d’autant plus véridique que Nadar se refusait à la pratique des retouches. Dès lors, la présence des modèles ne tient qu’à l’art déployé par celui qui les représente, c’est-à-dire la façon dont il les fait poser, celle dont il les éclaire. Se forge ainsi, immédiatement reconnaissable, « un style Nadar »… De plus, Nadar utilise la lumière artificielle et bannit accessoires et décors. Il y a là une force psychologique qui ne saurait laisser indifférent, d’autant moins que le photographe choisit ses sujets au sein de l’élite intellectuelle de son temps. Voisinent en effet ici des poètes (Baudelaire, Mickiewicz), des musiciens (Verdi, Berlioz, Offenbach), des écrivains (Daudet, Dumas, Zola et Victor Hugo), quelques scientifiques (Becquerel), des architectes (Garnier), et une pléiade de peintres (Corot, Courbet, Delacroix, Doré). Dans la grande majorité des cas, il s'agit d'amis, de connaissances ou du moins de gens pour lesquels Nadar éprouve de l’admiration, et il les immortalise de façon saisissante.
Nadar savait aussi cultiver l’amitié. Les meilleures photographies sont celles qui laissent transparaître les liens d’amitié ou d’admiration liant l’artiste et ses modèles. L’identité de ceux-ci laisse supposer qu’il avait bon goût, mais il ne montra que l’intelligentsia. C’est là un aspect d’une époque, mais pas le seul et, malgré l’immense intérêt de son œuvre, le photographe ne suffit pas à témoigner du Second Empire qu’il ne voit qu’à travers un brillant prisme.
(La publication est préparée
par Elena PANITCHEVA)