Arts et culture
Cette vie pleine de risque...
« J’ai toujours aimé tenter le diable, vivre au-dessus de mes moyens.
Je dois tenir ça d’une de mes grand-mères qui était d’origine russe... »
Françoise SAGAN
Après son accident de voiture du 14 avril 1957
La vie faste continue. Françoise aime le risque : « Quand on risque sa vie, on est persuadé qu’on ne va pas la perdre... Je n’ai pas peur de mourir, je n’y tiens pas... », affirme-t-elle. Cependant, cette vie pleine de risque manque s’achever un dimanche d’avril 1957, quand sa voiture sort de la route, bascule dans un fossé et se retourne dans un champ de blé. Sous la violence du choc, les trois passagers sont éjectés. Tous sont en vie. Quant à Françoise, elle reste coincée sous le volant. Une tonne et demie d’acier retombe sur elle. Les sauveteurs ont du mal à désincarcérer le corps de l’armure du métal. Gravement blessée, elle est transportée à l’hôpital. On la pense perdue. Ses proches sont à ses côtés. Dehors, les journalistes arrivés du monde entier. Le personnel de la clinique ne sait plus où mettre les fleurs qui arrivent, les témoignages de sympathie. Le portrait de Françoise fait la une des journaux du monde entier. Par bonheur, la mort recule au bout de trois jours, contrairement aux pronostics médicaux. Françoise émerge du « grand trou noir » avec onze côtes cassées et une longue et pénible convalescence, mais sans avoir perdu ce goût de la vitesse. A la clinique, pour calmer ses douleurs, on lui a administré de la morphine, des mois durant. Car seule la morphine parvient à étouffer la douleur. Ce qui est dramatique c’est que ce médicament provoque une accoutumance1. C’est ainsi que Françoise commence à s’adonner à la drogue. Celle qui incarne la femme libre de l’après-guerre devient dépendante. À l’automne 1957, son médecin l’oblige à une première cure de désintoxication. Ça se passe plutôt mal : elle se désespère, mais lutte heure par heure, minute par minute. Dans la clinique, elle tient le journal, silencieux témoin de ses souffrances et de ses espoirs : « Je crois que je ne suis plus amoureuse de personne… Je vais me soigner, me bronzer, me refaire les muscles un par un, m’habiller, me ménager infiniment les nerfs, me faire des cadeaux. M’aimer. »2
1957. Cette vie pleine de risque... du 14 avril 1957
Depuis son accident de voiture en 1957, elle a beaucoup changé. Elle arrive à peine à se lever, à se déplacer. Ses muscles ne répondent plus. Elle se nourrit très mal. Mais elle fait face. Elle met « une voilette » pour cacher ce qui lui arrive et continue d’incarner une fureur de vivre qui fait partie de sa légende. Il faut être heureuse pour plaire. « Eh bien je peux vous dire que la mort n’a rien de romantique. C’est plat, très terne, ça fait horreur... » Mais puisque son personnage est définitivement associé au culte de la voiture, de la vitesse, du danger, Sagan a envie d’être gaie. Son génie du danger fascine les foules. Le grand public la suit toujours.
1 Dépendance.
2 Cité d’après Madame Sagan de Geneviève Moll.