Mon amie la langue française
Lioudmila RYJOVA
Caractéristiques du théâtre
(Suite. Voir NN°10, 12, 13, 14/2009)
A. MEUNIER, Paris, Comédie-Française
La double appartenance au texte et à la représentation contribue à faire du théâtre un genre très diversifié. Selon qu’on privilégie l’un ou l’autre de ces deux pôles, on obtient des œuvres très différentes : les deux extrêmes coexistent. Si l’on prend l’exemple du XVIIe siècle, on constate que la comédie se veut alors un art de la représentation, héritier de la commedia dell’arte italienne qui improvisait à partir d’un texte réduit à un canevas. Molière ne dit-il pas, dans l’avertissement « au lecteur » placé en tête de L’Amour médecin, quand il est publié : « On sait bien que les comédies (au sens général de pièce de théâtre) ne sont faites que pour être jouées, et je ne conseille de lire celle-ci qu’aux personnes qui ont des yeux pour découvrir dans la lecture tout le jeu du théâtre » ? Au même moment, la tragédie se présente avant tout comme un texte poétique, très travaillé littérairement, dont la représentation est inévitablement très statique.
On ne peut nier la nécessité de la représentation. Le texte est une partition qui appelle un interprète. De ce fait, le même texte donne lieu à des interprétations différentes, voire opposées. Comment saisir les intentions de l’auteur quand le texte qu’il écrit est toujours prononcé par un personnage et que son intervention est réduite aux seules indications des didascalies ? Par exemple, le Dom Juan de Molière est-il un individu méprisable, pervers et décadent, ou il est le seul être capable de se libérer des entraves de la religion et de la société ? Ces interprétations extrêmes ont été données, et l’on n’est pas loin de penser que le texte les autorise l’une et l’autre sans qu’on puisse honnêtement privilégier l’une des deux.
Comédie-Française, le XVIIIe siècle
Comme la représentation le destine à un groupe social, à une communauté, le théâtre prend toutes les dimensions d’une manifestation publique. D’ailleurs, à l’origine, il est lié aux cérémonies religieuses de la cité. Il s’en dégage ensuite, mais encore maintenant la représentation comporte sa sacralisation, avec ses hauts lieux aussi divers que la Comédie-Française, le palais des Papes à Avignon, la Cartoucherie de Vincennes, ses idoles (acteurs adulés), et ses rites : les trois coups, le lever du rideau, le salut final... Le fait qu’il soit manifestation publique explique l’intérêt que lui ont toujours porté les autorités politiques. Il est subventionné, mais aussi surveillé, et la censure s’est historiquement plus souvent adressée au théâtre qu’aux autres genres. À certaines époques on l’interdit, à d’autres on s’en sert pour la propagande. Car il devient facilement une tribune pour l’expression des opinions et des refus. Il n’est pas rare que les applaudissements, dans une salle, correspondent à une réplique qui, volontairement ou non, fait allusion à un événement d’actualité. Le théâtre est directement lié à la vie de la cité, et on comprend qu’il puisse devenir subversif.
VOCABULAIRE
appartenance (f) à qch – принадлежность к чему-л.
contribuer à qch – способствовать чему-л.
privilégier qch – отдавать предпочтение чему-л.
se vouloir qch – претендовать на что-л.
héritier (m) – наследник
réduire qch – сокращать
canevas (m) – канва; зд.: сюжетная линия
avertissement (m) – предисловие
partition (f) – зд.: партитура
interprète (m) – интерпретатор
intention (f) – интенция, замысел
intervention (f) – вмешательство
pervers, -e – извращенный, испорченный
entrave (f) – препятствие, помеха
autoriser qn – разрешать, позволять кому-л.
se dégager de qch – освобождаться от; выделяться из чего-л.
sacralisation (f) – зд.: таинство
haut-lieu (m) – центр, средоточие; важное место
aduler qn – льстить, заискивать перед кем-л.; расхваливать, восторгаться, осыпать похвалами
rite (m) – ритуал, обряд
faire allusion à qch – намекать на что-л.
subversif, -ve – разрушительный, ниспровергающий
Exercices
1. Trouvez 5 noms du féminin et 5 noms du masculin ayant des suffixes spécifiques du genre.
2. Déterminez le genre des noms ci-dessous :
appartenance, genre, œuvre, pôle, extrême, art, héritier, canevas, avertissement, jeu, nécessité, interprète, fait, personnage, entrave, groupe, dimension, haut-lieu, communauté, cérémonie, lieu, idole, rite, intérêt, tribune, opinion, allusion.
3. Conjuguez les verbes ci-dessous au présent de l’indicatif :
privilégier, savoir, se dégager, interdire, devenir, comprendre.
4. Déterminez la forme du prédicat dans les phrases suivantes.
1. On sait bien que les comédies (au sens général de pièce de théâtre) ne sont faites que pour être jouées. 2. Ces interprétations extrêmes ont été données, et l’on n’est pas loin de penser que le texte les autorise l’une et l’autre sans qu’on puisse honnêtement privilégier l’une des deux. 3. Il n’est pas rare que les applaudissements, dans une salle, correspondent à une réplique qui, volontairement ou non, fait allusion à un événement d’actualité.
5. Mettez les prépositions convenables, s’il le faut.
1. Le théâtre est directement lié … la vie de la cité. 2. La double appartenance … texte et … la représentation contribue … faire du théâtre un genre très diversifié. 3. On ne peut … nier la nécessité de la représentation. 4. Comment saisir les intentions de l’auteur quand le texte qu’il écrit est toujours prononcé … un personnage et que son intervention est réduite … seules indications des didascalies ? 5. On n’est pas loin … penser que le texte les autorise l’une et l’autre sans qu’on puisse honnêtement … privilégier … l’une des deux. 6. À l’origine, le théâtre est lié … cérémonies religieuses de la cité. 7. À certaines époques on l’interdit, … d’autres on s’en sert … la propagande. 8. Il n’est pas rare que les applaudissements, dans une salle, correspondent … une réplique qui, volontairement ou non, fait allusion … un événement d’actualité.
6. Répondez aux questions.
1. Pourquoi le théâtre se présente-t-il comme le genre très diversifié ? 2. Comment Molière considère-t-il la comédie ? 3. La comédie, quel art se veut-elle au XVIIe siècle ? 4. Comment la tragédie se présente-t-elle à cette époque-là ? 5. Pourquoi le texte théâtral appelle-t-il un interprète ? 6. À quoi le texte théâtral donne-t-il lieu ? 7. Quel est l’intervention de l’auteur dans le texte théâtral ? 8. Pourquoi les interprétations d’un texte théâtral peuvent être très différentes, voire opposées ? 9. Est-ce que les autorités politiques ont porté au théâtre un intérêt particulier ? 10. En quoi consiste cet intérêt des autorités politiques ? 11. Pourquoi le théâtre peut-il devenir subversif ?
7. Dites en français :
1. Комедия – это прежде всего представление. 2. Комедия создается только для того, чтобы быть представленной (сыгранной) на сцене. 3. Мольер говорил: «Я советую читать комедии только тем, кто имеет глаза, чтобы при чтении увидеть всю игру театра». 4. В то же время трагедия выступает как поэтический, литературно обработанный текст, представление которого неизбежно статично. 5. Театральный текст требует интерпретатора. 6. Один и тот же текст предоставляет возможность для различных, даже противоположных, интерпретаций. 7. Как понять намерения автора пьесы, если его участие (вмешательство) сводится лишь к авторским ремаркам? 8. Дон-Жуан, это презренный тип или герой, способный бороться с путами религии и общества? 9. Сам текст дает право на противоположные интерпретации, не отдавая предпочтения ни одной из них. 10. Представление предназначено для некоторой социальной группы, для некоторого сообщества. 11. Поэтому театр принимает все характеристики общественного явления. 12. Сначала театр был связан с религиозными церемониями, затем он освобождается от них. 13. Но в представлении имеется некое таинство, обеспечивающееся театральной сценой и ритуалами. 14. Как явление публичное, театр вызывает интерес в политических кругах. 15. В театр вкладывают средства, за театром следят, и цензура обращается к театру чаще, чем к другим жанрам. 16. Иногда театр запрещают, иногда он становится средством пропаганды, так как он легко превращается в трибуну для выражения мнений и запретов.