Главная страница «Первого сентября»Главная страница журнала «Французский язык»Содержание №23/2009

Les Routes de l’Histoire

Alla CHEÏNINA

L’année 1791. La France nouvelle

(Suite. Voir N°8, 9, 10, 12, 13, 14, 15, 17, 18, 19, 21/2009)

Chronologie des événements

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Donjon du Château de Vincennes

29 janvier : La mort de Mirabeau.

28 février : L’affaire des « chevaliers du poignard ».

21 juin : Louis XVI tente de s’enfuir à l’étranger, il est arrêté à Varennes et ramené aux Tuileries. Les pouvoirs du roi sont suspendus.

12 juillet : Voltaire entre au Panthéon.

17 juillet : Le massacre du Champ-de-Mars.

27 août : La Prusse et l’Autriche déclarent que la France révolutionnaire est un danger pour l’Europe.

3 septembre : La Constituante vote la première Constitution de la France (monarchie constitutionnelle).

1er octobre : L’Assemblée législative succède à la Constituante.

Mesdames quittent la France

Le 19 février 1791, Mesdames, les tantes de Louis XVI, quittent Paris pour Rome. Mais la splendeur de leur équipage les fait remarquer, et elles sont arrêtées non loin de Paris, près de Fontainebleau. Elles présentent leurs passeports et les autorités finissent par leur accorder l’autorisation de poursuivre leur voyage. Après cet incident, la situation se durcit. Les rumeurs du complot contre-révolutionnaire grandissent, la guerre civile couve. Le 28 février 1791, une émeute se produit faubourg Saint-Antoine. Des gentilshommes s’introduisent au palais des Tuileries, faisant rebondir les rumeurs d’un départ du roi, qu'on accuse de vouloir prendre la tête des armées ennemies pour massacrer les patriotes.

La mort de Mirabeau

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Honoré Gabriel Riqueti, marquis de Mirabeau (1749-1791)

Le 29 janvier 1791, Mirabeau est élu président de l’Assemblée nationale. Mais il est si gravement malade qu’il ne peut se rendre aux séances que porté par ses valets. Parmi le peuple, le bruit se répand que la Cour lui fait prendre du poison ! Cependant, Mirabeau assume sa fonction avec conviction et talent. Le 28 février, il intervient en faveur des deux vieilles tantes de Louis XVI, que l’on soupçonne de vouloir émigrer. Il plaide le respect de la liberté individuelle. Un mois plus tard, « la mort entre les dents et toute peinte sur son visage », il siège toujours à l’Assemblée. Le 2 avril, Mirabeau s’éteint à l’âge de quarante-deux ans. Les obsèques de Mirabeau se déroulent dans « la pompe funèbre la plus vaste, la plus populaire qu’il y ait au monde. » Jamais une foule aussi nombreuse n’a été mobilisée à Paris par la mort d’un homme politique. Les Parisiens silencieux et bouleversés se pressent sur le parcours de l’impressionnant cortège. La veille, l’Assemblée nationale a décidé de transformer l’église Sainte-Geneviève, qui vient d’être achevée et rebaptisée Panthéon, en un mausolée consacré aux grands hommes. Mirabeau sera donc le premier héros de la Révolution à être enterré au Panthéon, après qu’une salve a été tirée par les gardes nationaux.

Mais le 20 novembre 1792, on découvre de nombreux papiers prouvant les relations secrètes que Mirabeau a entretenues avec le Roi ainsi que les plans pour sauver la monarchie. Et l’on crie à la trahison ! Mirabeau ne mérite donc pas le mausolée : sa dépouille est retirée du monument et jetée à la fosse commune.

Mirabeau disparu, le couple royal et la Révolution se sont trouvés face à face. De nouveau la Cour est seule.

Combattre ou capituler ? Fuir ou rester ?

La situation de Louis XVI est de plus en plus critique. En fait, il est retenu prisonnier au palais des Tuileries avec sa famille. Le Roi lit les journaux révolutionnaires et comprend que l’unique possibilité de se sauver et de sauver ses proches est de fuir. Son frère le comte Artois (futur Charles X) a quitté la France et rassemble les émigrés dans l’espoir de constituer une armée. À Lyon, les royalistes s’organisent et envisagent de soulever toute la région, de la Bourgogne à la Provence. Et Marie-Antoinette pense qu’il faut demander l’aide de son frère, l’Empereur d’Autriche Léopold. L’Europe des rois s’inquiète de la « contagion » révolutionnaire. Louis XVI espérait que tout s’apaise, mais il voit maintenant que la haine se répand partout dans son royaume. L’armée est déchirée entre les soldats et les officiers aristocrates. Les Parisiens veulent démolir le donjon de Vincennes, qu’on dit destiné à être utilisé comme une nouvelle Bastille.

L’affaire des « chevaliers du poignard »

img4 Le Roi commence à comprendre que l’unique possibilité de se sauver et de sauver ses proches est de s’évader. La première tentative d’évasion a lieu le 28 février 1791. Cet épisode est connu sous le nom de l’affaire des « chevaliers du poignard». Ce jour-là, plusieurs centaines de gentilshommes, venus de Paris et de province, armées de cannes-épées et de poignards de chasse s’introduisent au palais des Tuileries, en cachette. Ils affirment craindre pour la vie du Roi. Les patriotes les soupçonnent d’avoir voulu enlever le Roi et sa famille. La garde nationale accourt et ordonne aux fidèles de Louis XVI de déposer leurs armes. Louis XVI a honte de ne pas avoir pu défendre l’honneur de ceux qui étaient prêts à mourir pour lui. Il les a trahis. L’échec des « chevaliers du poignard », comme on les surnomme dès le lendemain, a un effet inattendu : certains partisans de Louis XVI choisissent d’émigrer, déçus par le Roi qui n’a manifesté aucun soutien aux gentilshommes soucieux de son sort … C’est alors que Louis fait son choix.

La fuite

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Axel de Fersen (1755-1810)

Il est donc désormais résolu à quitter cette prison des Tuileries. Et le fidèle ami suédois Fersen, amoureux, comme on le dit, de Marie-Antoinette, prépare les conditions de la fuite. Mais il y a quelque chose d’inquiétant dans l’air de Paris, écrasé par une chaleur lourde et orageuse, en ces derniers jours du mois de juin 1791. Comment peut-il savoir qu’on prépare la fuite ? Ne faudrait-il pas attendre encore un peu pour que les rumeurs se calment ? Non, les dés sont jetés.

 

Fuir, c’est décidé

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Le 18 avril 1791, le Roi avait voulu aller à Saint-Cloud. Le Roi, la Reine, les évêques, les serviteurs remplissent déjà les voitures dans lesquelles on devait faire ce voyage ; mais le peuple empêche le Roi de sortir des Tuileries. Le Roi insiste. Le Tocsin de Saint-Roch commence à sonner. Des milliers de voix crient :

– Non ! Non ! Non ! Le roi veut fuir ! 

– Je vous aime trop pour vous quitter, mes enfants ! dit le Roi.

– Nous aussi, Sire, nous vous aimons, mais VOUS SEUL.

La Reine, exceptée de cet amour de la France pour son souverain, pleure, mais est forcée de rentrer aux Tuileries. Le Roi est donc captif, la chose est constatée.

Le Roi aurait pu partir seul à cheval ; grand chasseur, bon cavalier, rien ne lui était plus facile que de gagner, déguisé en courrier, quelque escorte assez puissante pour le conduire à la frontière. Mais, pendant la nuit du 5 au 6 octobre, la Reine lui avait fait jurer qu’il ne partirait jamais seul et ne quitterait la France qu’avec elle et ses enfants. Bon mari, bon père, autant que mauvais roi, il voulait bien se parjurer vis-à-vis de son peuple, mais non vis-à-vis de sa famille. Il était donc résolu que tout le monde fuirait ensemble, le Roi, la Reine, les enfants de France.

La Reine avait plus d’intérêt encore que le Roi de quitter la France. Elle n’était plus aimée, mais encore elle était haïe. On l’avait appelée Madame Déficit, on l’appellera bientôt Madame Veto.

D’abord, la Reine, au lieu de deux simples diligences anglaises, fait confectionner deux énormes berlines où elle pourra entasser valises, malles et sacs de nuit. On s’était inquiété d’abord de la chose la plus difficile : à savoir de quelle façon on sortirait des Tuileries. La famille royale était bien réellement prisonnière. Six cents gardes nationaux, tirés des différentes sections de Paris, montaient chaque jour et chaque nuit la garde aux Tuileries : deux gardes à cheval se tenaient constamment devant la porte extérieure ; des sentinelles étaient posées à toutes les portes du jardin, et, sur la terrasses de la rivière, elle étaient échelonnées à cent pas les unes des autres. À l’intérieur, c’était bien autre chose encore : il y avait des sentinelles qui conduisaient au cabinet du Roi et de la Reine ; le Roi et la Reine ne sortaient que sous l’escorte. En outre, la plupart des valets étaient des espions. Comment échapper à une telle surveillance ? La Reine y avait longtemps réfléchi.

(Alexandre DUMAS, La Route de Varennes)



1 Il s’agit de 5 au 6 octobre 1789, où le peuple est venu chercher le roi à Versailles.

(à suivre)

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